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29 juillet 2018 7 29 /07 /juillet /2018 21:16

Les Gueux des Bois

 

Chanson française – Les Gueux des Bois – Marco Valdo M.I. – 2018
Ulenspiegel le Gueux –
75
Opéra-récit en multiples épisodes, tiré du roman de Charles De Coster : La Légende et les aventures héroïques, joyeuses et glorieuses d’Ulenspiegel et de Lamme Goedzak au Pays de Flandres et ailleurs (1867).
(Ulenspiegel –
III, XXXIV)

 

 

 

 

Dialogue Maïeutique

 

À en croire le titre de la canzone, dit Lucien l’âne, il y aurait une troisième sorte de Gueux ; après les Gueux de terre et les Gueux de mer, on découvre les Gueux des bois. Dans le fond, c’est bien possible et cette nouvelle sorte de Gueux dans son village perdu dans les feuillages me fait irrésistiblement penser à Walter Scott et à son Robin des Bois.

 

À mon sens aussi, ce n’est pas sans rapport, dit Marco Valdo M.I., d’autant que Charles De Coster, né en 1827, avait sans aucun doute pu lire, déjà dans son enfance ou son adolescence, l’Ivanhoé qui était le livre d’aventures par excellence et avait marqué les romanciers romantiques de sa génération. C’est notamment le cas d’Alexandre Dumas. Par ailleurs, la canzone reprend et sans hésitation cette même filiation.

 

Pour ce que j’en ai vu, et pas seulement le titre, dit Lucien l’âne, c’est évident. D’autre part, Till lui-même a des points communs avec l’archer vert de la Forêt de Sherwood : guerre de libération, résistance, justicier au grand cœur, combattant inébranlable qui prend le parti des pauvres contre les riches… J’arrête là, mais la chose est certaine. Je pense aussi reconnaître ton goût pour le deuxième sens des mots et des choses dans le titre qui sonne à mon oreille d’âne de bien curieuse façon ; il me semble entendre : les gueules de bois. Mais peut-être est-ce pure supputation de ma part ?

 

Lucien l’âne mon ami, je ne répondrai pas à pareille insinuation mal torchée, car elle a toutes les raisons d’être pertinente. Cependant, pur en revenir à cet épisode de la Légende et à cette troisième sorte de Gueux, il me semble qu’elle a dû nécessairement exister, car la répression espagnole chassait les hérétiques et avait provoqué des exils nombreux ; de surcroît, dans toutes les guerres de résistance et de libération, on trouve toujours des maquis, des forêts, des bois, des marais, des montagnes, quand ce n’est pas des déserts qui sont des lieux de refuge pour les rebelles. Et enfin, il y aurait mille et mille choses à dire encore, mais ce n’est pas le lieu ici pour des développements encyclopédiques. Ici, nous ne faisons qu’effleurer les choses ; quant aux détails, la chanson en fourmille.

 

En effet, Marco Valdo M.I., ici, on laisse place à l’imagination et à la patiente recherche. Nous pauvres lélians, pauvres descendants des canuts, nous n’avons pas le temps, ni la notoriété nécessaires pour pontifier. Il nous revient seulement de tisser le linceul de ce vieux monde insensé, injuste, imbécile, incorrect et cacochyme.

 

Heureusement !

 

Ainsi Parlaient Marco Valdo M.I. et Lucien Lane

 

 

 

Le soleil d’été tue l’ombre ;

À midi, le répit n’existe pas.

Délaissant le bord de la rivière,

Till et Lamme entrent dans le bois.

 

Assis à l’orée de la clairière,

Ébahis, les deux compères

Regardent passer les cerfs

Et les broquarts surgissant du vert.

 

Till dit : « Tirons ce gibier

Qui va à sa reposée dans le hallier.

Poursuivons-le dans le fourré,

Il nous fera de quoi manger. »

 

Lamme répond : « Cerf est gibier de roi.

Laisse courir cette bête-là !

Si on nous prend à le chasser,

Nous serons pendus sans pitié. »

 

Une bande de loqueteux armés

Qui chassaient la harde.

Emmènent Till et Lamme prisonniers

À leur campement, sous bonne garde.

 

Au camp, des hommes en armes,

Des femmes, des enfants, tous en alarme.

Till dit : « N’êtes-vous pas nos Frères des bois

Qui fuient la persécution des soudards du roi ? »

 

« Nous sommes Frères des Bois,

Dit le plus vieux, mais qui es-tu, toi ? »

« Je suis, dit Till, peintre, manant, sculpteur,

Par le monde, je vais libre et sans peur. »

 

« Et qui es-tu toi, gros homme ?

« De par le monde, je cherche ma femme. »

« Écoute la sonnerie, le cerf est mort.

Nous le mangerons ce soir encore. »

 

Till dit : « Ne craignez-vous pas

Les juges, les happe-chair, les forestiers ? »

« Nous sommes nombreux, ils préfèrent nous ignorer.

Nous vivons en paix, tant que l’Espagnol n’est pas là. »

 

Till dit : « C’est sur mer,

Qu’il faut combattre ce fléau.

Pour chasser le bourreau et ses féaux,

Il n’est plus temps de guerre sur terre. »

 

 

 

Les Gueux des Bois
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Published by Marco Valdo M.I.
27 juillet 2018 5 27 /07 /juillet /2018 20:29

 

La Femme de Lamme

 

Chanson française – La Femme de Lamme – Marco Valdo M.I. – 2018
Ulenspiegel le Gueux –
74
Opéra-récit en multiples épisodes, tiré du roman de Charles De Coster : La Légende et les aventures héroïques, joyeuses et glorieuses d’Ulenspiegel et de Lamme Goedzak au Pays de Flandres et ailleurs (1867).
(Ulenspiegel –
III, XXIX)

 

 

 

 

 

 

Dialogue Maïeutique

 

La Femme de Lamme, dit Lucien l’âne, me fait penser par sa cadence à La Cane de Jeanne de Brassens et je me demande même si tu n’y as pas pensé toi aussi lorsque tu as choisi ce titre.

 

Eh bien, Lucien l’âne mon ami, tu es un devin plein de prescience ou alors, tu me connais très bien, car c’est exactement ce qui s’est passé. Tout comme j’ai en tête des jeux d’allitérations tels que la flamme de Lamme, la femme de flamme et toutes sortes de variantes assez bizarres.

 

Je te connais assez, en effet, Marco Valdo M.I. mon ami, pour savoir que les mots dansent dans ta tête une rumba d’enfer ; ils sautent dans tous les sens et s’alignent en des constellations perpétuellement changeantes. Mais dis-moi, la chanson, que raconte-t-elle ?

 

On sait depuis le début que Lamme cherche sa femme et que c’est même la raison qui le pousse à suivre son ami Till dans cette odyssée du Nord. Il y avait là un mystère proprement irrésolu et inquiétant : qu’est devenue la femme de Lamme, pourquoi est-elle partie? Ce mystère va être partiellement éclairci par la chanson : on va savoir comment et pourquoi la femme de Lamme est partie. Cependant, on ne sait pas où. On va aussi savoir que Lamme la croit fidèle et pourquoi.

 

Bien, bien, Marco Valdo M.I. mon ami, je bous de le savoir. Dis-le moi tout de suite.

 

Donc, Lucien l’âne mon ami, Lamme et sa femme étaient les gens les plus heureux ensemble ; Lamme adorait sa femme et elle l’aimait d’amour et comme il est dit dans les astres, ils s’aiment toujours encore. Mais c’était compter sans l’intervention d’un religieux qui sut convaincre la femme de consacrer à Dieu sa vertu ; ainsi, un jour, elle commença à se refuser à Lamme et quelque temps plus tard, elle s’en fut. Où ça ? Mystère ! Depuis Lamme la cherche partout et mène cette longue recherche et s’engage dans la guerre pour retrouver son tranquille bonheur qu’un représentant de Dieu lui a volé. Voilà pour l’anecdote et cette anecdote de cette amoureuse poursuite est une parabole, une métaphore de la poursuite de la tranquillité perdue du peuple des Pays et de la résistance des Gueux à l’occupant espagnol, à son égérie, l’Inquisition et à sa toute puissant maîtresse, l’Église catholique.

C’est en quelque sorte aussi un récit harmonique de la légende de Till et Nelle et un écho résonnant de la guerre de libération ; ce sont des histoires qui s’imbriquent les unes dans les autres.

 

Oh, dit Lucien l’âne, une histoire d’amour pour conter l’Histoire, voilà qui est romantique. Maintenant, reprenons notre tâche et tissons le linceul de ce vieux monde religieux, dominateur, escamoteur, manipulateur et cacochyme.

 

Heureusement !

 

Ainsi Parlaient Marco Valdo M.I. et Lucien Lane

 

 

La femme de Lamme s’en est allée

À Bruges ; elle est revenue bien changée.

Ma femme, dit Lamme, m’aime trop

Comme moi, je l’aime ce tantôt.

 

Ce jour-là, elle me dit au doux instant,

« Il nous faut vivre comme des amis.

Je t’aime Lamme, tu es mon mari,

Pénitence et vertu me tiennent à présent.

 

Oh, bon Lamme, jusqu’aujourd’hui,

Tu cuisinas, tu balayas notre logis.

Tu m’épargnas tout effort,

Mon homme, je vais te servir jusqu’à la mort.

 

Te servir humblement, mon bel ami,

Mais rien de plus, mon chéri. »

« Ô femme, ne sépare par ces cœurs

Et ces corps, unis dans le bonheur ! »

 

« Il le faut, mon aimé, j’ai juré.

J’ai fait vœu

Par-devant Dieu

Et le prêtre qui m’a conseillé. »

 

« Dès ce moment-là,

Elle ne voulut plus de moi

Comme son époux véritable.

Voyez ma situation épouvantable.

 

Je lui dis : « M’amie, mon Pot au feu d’amour,

Que vous êtes grasse, mignonne et tendre !

Avec quelle autre poulette m’entendre ?

Où va, rivière fraîche, le chemin de ton cours ?

 

Je ne mangerai plus de toi encore ?

Où sont tes baisers au thym,

Ta bouche rosée du matin,

Ton cœur, ton sein, le frisson de ton corps ?

 

Quelle piété absurde de me délaisser,

Jeunes encor et pas encore vieux,

Pour satisfaire aux caprices d’un dieu

Jaloux sans doute de nos baisers.

 

Oh, ma femme, je te retrouverai

Et de cette religieuse passion,

Je te délivrerai.

Foi de Lamme, foi de garçon ! »

 

 

 La Femme de Lamme
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Published by Marco Valdo M.I.
26 juillet 2018 4 26 /07 /juillet /2018 22:00

 

La Vengeance

 

Chanson française – La Vengeance – Marco Valdo M.I. – 2018
Ulenspiegel le Gueux –
73
Opéra-récit en multiples épisodes, tiré du roman de Charles De Coster : La Légende et les aventures héroïques, joyeuses et glorieuses d’Ulenspiegel et de Lamme Goedzak au Pays de Flandres et ailleurs (1867).
(Ulenspiegel –
III, XXIX)

 

 

Le prévôt Spelle et ses happe-chair.

 

 

La Vengeance, dit Lucien l’âne. Je me demande bien laquelle, mais je suis certain qu’il doit s’agir d’une histoire terrible, d’une affaire de vie et de mort.

 

De vivants et de morts plutôt, dit Marco Valdo M.I., et comme d’habitude, tu as deviné juste. Enfin, presque ; c’est plus qu’une affaire de vie et de mort, plus qu’une affaire, car la vengeance ici est au moins double. Il y a en premier plan la vengeance que Till exécute afin de punir le prévôt Spelle le Roux d’avoir torturé et finalement fait mourir Michielkin, le frère de l’amie de Till et en arrière-plan, mais très présente, la vengeance que Till poursuit depuis la mort sur le bûcher de Claes, son père et qui est au cœur même de la Légende, dont elle est un des moteurs. C’est elle qui se cache sous l’antienne : « Les cendres battent ».

 

Et Till ne doit pas être le seul à sentir ce besoin, ce désir de vengeance, dit Lucien l’âne.

 

Certes non, réplique Marco Valdo M.I., ils sont très nombreux tout comme sont très nombreux les bûchers et les crimes de l’occupant espagnol et des gens de l’Inquisition. Il y a là une colère générale qui s’alimente des tortures, des exactions, des exils et des exécutions. Les flammes des bûchers attisent l’incendie gigantesque qui progressivement s’étend au travers des Pays.

 

Tout ça à cause de l’imbécile obstination des Grands d’Espagne et la méchante rancœur de l’Inquisition, dit Lucien l’âne. Mais, dis-moi, Marco Valdo M.I., que raconte la chanson ?

 

Oh, Lucien l’âne mon ami, je te ferai grosso modo la réponse habituelle. De façon générale, la canzone rapporte la manière dont Till va opérer cette vengeance ; quant aux détails, on les trouve dans la chanson. La seule chose que je veux ajouter, avant de te laisser conclure, c’est ce nouveau rôle d’ange de la mort ou de vengeur que Till remplit ici avec un certain brio. À ce sujet, j’ai moi-même rencontré, il y a quelques années, un homme qui avait – comme d’autres – joué ce rôle de vengeur, vers 1943-45, pour le compte de la Résistance.

 

Et puis, Marco Valdo M.I., avant de conclure, il me plaît de rappeler que tu as déjà tracé le déroulement d’une telle action dans ta chanson « L’Homme en gris », qui reprenait le thème de « Morto sul selciato », une de ces chansons bilingues français-italien. Maintenant, reprenons notre tâche et tissons le linceul de ce vieux monde tyrannique, meurtrier, assassin et cacochyme.

 

 

Heureusement !

 

Ainsi Parlaient Marco Valdo M.I. et Lucien Lane

 

 

L’âme en peine vague Lamme,

Qui se lamente par les rues de Gand.

Il mange, il boit, il cherche sa femme

Et vend des couques aux passants.

 

Till vend ses osiers et ses ratières.

Till tel un facteur porte des secrets à des inconnus,

Et collecte les fonds pour la guerre.

Par trahison, tout ce réseau sera un jour vendu.

 

Sur sa haridelle, le prévôt Spelle le Roux,

Armé de sa baguette rouge, sévit partout.

Il porte partout échafauds, bûchers, fosses

Où il enterre – vives – filles minces et grosses.

 

Les jours de juin sont tristes et pluvieux ;

Les temps sont difficiles pour les Gueux.

Sur la route, Till rencontre Boelkine,

Une fille libre qui l’accueille sous sa capeline.

 

Le temps passe en amoureux ramages.

Spelle le Roux arrive dans le village, aussitôt,

Les roucouleux fuient l’odieux prévôt

Au bourg voisin, à l’Étoile des Trois mages.

 

Boelkine dit : « Spelle et ses happe-chair

Ont pris et torturé mon frère.

La gangrène a mangé ses pieds,

Il est mort, il doit être vengé. »

 

Till dit : « Les cendres brûlent en ma poitrine,

Je vengerai ton frère, Boelkine

Et Spelle le Roux, par le cou, sera pendu ;

Mon cœur tout entier y est résolu. »

 

D’argile modelé, peint et cuit

Till fait de Michielkin, un masque mortuaire ;

À ses amis, il donne rendez-vous la nuit ;

Le curé même, il prie d’être témoin de l’affaire.

 

Spelle rentre de beuverie à la mi-nuit.

Le fantôme de Michielkin se dresse devant lui

Et le force à avouer et dix-sept témoins et le curé

Entendent Spelle de tant de crimes se dénoncer.

 

Au duc, je vais l’accuser, dit le curé.

Mieux vaut qu’il meure de la corde du bourreau,

Que des mains d’un fantôme nouveau.

Spelle le Roux pendu, le roi va hériter.

 

La Vengeance
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Published by Marco Valdo M.I.
24 juillet 2018 2 24 /07 /juillet /2018 21:43

 

Lamme philosophe

 

Chanson française – Lamme philosophe – Marco Valdo M.I. – 2018
Ulenspiegel le Gueux –
72
Opéra-récit en multiples épisodes, tiré du roman de Charles De Coster : La Légende et les aventures héroïques, joyeuses et glorieuses d’Ulenspiegel et de Lamme Goedzak au Pays de Flandres et ailleurs (1867).
(Ulenspiegel –
III, XXIX)

 

 

 

 

 

Dialogue Maïeutique

 

Lamme philosophe ?, s’étonne Lucien l’âne. Voilà qui tombe bien pour un dialogue maïeutique. Cependant, je n’aurais jamais imaginé que Goedzak s’inscrive dans l’Histoire de la Philosophie. Si c’est le cas, il est philosophe de ma même manière que je le suis : c’est un philosophe de grand chemin.

 

En ce cas, Lucien l’âne mon ami, il rejoindrait François Villon et en d’autres temps, tu le sais, il aurait élégamment figuré parmi les participants de l’école péripatéticienne. Plus sérieusement, la chanson ne dit pas que Lamme est un philosophe, mais bien qu’il philosophe, ce qui revient à dire qu’il émet des considérations sur l’état du monde et sur la situation des gens dans ce monde.

 

Oh, Marco Valdo M.I. mon ami, j’avais perçu cette nuance et j’ai bien conscience que notre Goedzak n’a rien d’un de ces philosophes professionnels qui s’enferrent dans un monde philosophique désincarné qui s’éloigne aux confins de l’univers. C’est justement pour ça que j’avais précisé qu’il était un philosophe de grand chemin. Cela dit, on découvre ici qu’il y a au moins deux univers philosophiques et qu’ils ont tendance à s’écarter l’un de l’autre. Mais revenons à la chanson et à la philosophie selon Lamme.

 

Je ne te ferai pas l’ennui de détailler et d’analyser les propos de Goedzak, tu les trouveras excellemment rapportés dans la canzone et celui qui veut en savoir plus pourra toujours se reporter à la Légende, telle qu’elle est rapportée par Charles De Coster. Quant à les analyser, je laisse le soin à chacun de le faire, car je n’ai foutrement pas l’âme, ni les qualités d’un décortiqueur. Pourtant, je dirai encore deux mots relativement au débat qui s’instaure entre Lamme et le smitte qui situe le nœud de la guerre entre le refus de faire la guerre pour le profit des puissants et des riches et la nécessité de faire la guerre pour se défendre d’une agression guerrière et pour faire advenir le règne de liberté.

 

Certes, Marco Valdo M.I. mon ami, je te dirais – sans pour autant philosopher exagérément – que c’est le sens de La Guerre de Cent Mille Ans où certains (les riches, les puissants et leurs affidés) ont déclenché la guerre et la mènent sans répit afin de maintenir leur domination et tout ce qui s’ensuit et d’autres, mènent une guerre défensive pour mettre fin à la guerre elle-même. C’est aussi le sens du paradoxe pacifique : Guerre à la guerre ! ». Et je vois que dans la chanson, le dialogue entre Lamme et le smitte pose cette alternative à sa manière. Quant à nous, reprenons notre tâche et tissons le linceul de ce vieux monde guerrier, armé, massacreur et cacochyme.

 

Heureusement !

 

Ainsi Parlaient Marco Valdo M.I. et Lucien Lane

 

 

Lamme fera donc des couques et des beignets.

Till dit : « Il les mangera au lieu de les vendre.

Le smitte dit : « Rien n’est encore prêt

Et la grande besogne ne peut attendre. »

 

« J’ai faim », dit Lamme.

« Il y a du pain », dit le smitte.

« Sans beurre ? », demande Lamme.

« Sans beurre. », dit le smitte.

 

À la nuit, le smitte sort les armes :

Vingt arquebuses à réparer,

Cinquante lames à aiguiser.

Aux yeux de Lamme coulent les larmes.

 

Lamme dit : « Smitte, tu dédaignes ton corps

Et crois-moi, en vérité, tu as tort.

Il a besoin de repos autant que de pain,

De fèves, de bœuf, de bière et de vin.

 

Et nous sommes fous, nous, hommes de peu

De nous crever les yeux

Pour tous ces grands de la terre

Qui font entre eux la guerre.

 

Ils invoquent Dieu, la religion, les mystères

Dont en vérité, ils n’ont rien à faire

Et nous non plus, d’ailleurs

Qui supportons ces malheurs.

 

Regardez les champs, les prés ;

Regardez les moissons, les vergers.

Chasse, pêche, mer, terre :

Tout est à eux sans rien faire.

 

Et vous, vous vivez de pain et d’eau ;

Vous travaillez à vous casser le dos

Et quand vous mourez, sans vergogne,

Ils ignorent vos charognes. »

 

« Ho, dit le smitte, parle moins haut !

Certes, tout ce que tu dis n’est pas faux,

Mais le Prince de Liberté sacrifie

Ses biens et sa vie pour chasser la tyrannie. »

 

Pendant trois nuits, Till et Lamme

Fondent des balles et fourbissent des lames

Jusqu’à l’aube. Puis, la quatrième, les deux amis

S’en vont pour Gand au cœur de la nuit.

 

Lamme philosophe
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Published by Marco Valdo M.I.
22 juillet 2018 7 22 /07 /juillet /2018 18:28
La Ballade du Smitte

 

Chanson française – La Ballade du Smitte – Marco Valdo M.I. – 2018
Ulenspiegel le Gueux –
71
Opéra-récit en multiples épisodes, tiré du roman de Charles De Coster : La Légende et les aventures héroïques, joyeuses et glorieuses d’Ulenspiegel et de Lamme Goedzak au Pays de Flandres et ailleurs (1867).
(Ulenspiegel –
III, XXIX)

 

 

 

Dialogue Maïeutique

 

Comme tu peux l’imaginer, Lucien l’âne mon ami, Till et Lamme ne peuvent rester longtemps au même endroit, car tel est leur destin et telle est leur mission, qui est de porter les messages du Taiseux en mains propres à divers agents secrets et de contribuer ainsi à l’organisation de la résistance dans la partie des Pays sous contrôle des Espagnols. Ils sont donc toujours derrière les lignes ennemies et en grand péril d’être pris, torturés, emprisonnés, condamnés à mort et exécutés – peu importe la méthode pendaison, bûcher, décapitation, fusillade, que sais-je ?

 

En ce temps-là, je m’en souviens très bien, Marco Valdo M.I. mon ami, il n’y avait ni train, ni auto, ni avion et encore moins, de radio, de télégraphe ou de téléphone. Toute la transmission des informations se faisait nécessairement par voie humaine qui elle-même se faisait à pied, à cheval, à dos d’âne ou en bateau. On peut toujours penser aux pigeons, mais c’est une méthode très marginale, pas facile à mettre en œuvre.

 

Effectivement, Lucien l’âne mon ami, les choses s’organisaient ainsi. De plus, Till et Lamme ne font pas que porter des lettres, ils agissent et leur rôle est essentiel. Résumons-le : ils assurent la liaison dans le réseau des Gueux, ils transmettent les informations et les ordres, ils recueillent l’information, ils collectent les fonds, ils organisent le transfert des fonds et des armes, ils liquident les indicateurs, démasquent les espions et les assassins à la solde des Espagnols. Cependant, ils ne doivent pas être les seuls à faire ce travail, mais la Légende raconte leur histoire et en quelque sorte synthétise cette longue lutte de libération – on l’appelle d’ailleurs historiquement La Guerre de Quatre-Vingts Ans.

 

Tout ça est intéressant, dit Lucien l’âne, mais au fait, que raconte La Ballade du Smitte ? Et qui donc est ce Smitte ?

 

Commençons par expliquer le smitte, reprend Marco Valdo M.I. ; en fait, un « smitte » est un forgeron et il était de coutume d’appeler les gens par le nom de leur métier ou de leur titre, comme on disait frère ou chevalier et quand on parle du personnage – encore aujourd’hui – on fait précéder de l’article le nom de métier ou le titre, mais aussi le prénom ou le nom : le smitte, le docteur, l’assistant, le prof, le Roland, le Bill, le Dupont ou des deux – c’est le cas dans la Légende où le smitte de la chanson s’appelle le smitte Wasteele. Donc, le smitte, est un forgeron et ce smitte-là, un relais important du réseau des Gueux, qui va répondre par le cri du coq hardi au chant de l’alouette. Pour le reste, je ne dévoilerai pas plus ce que raconte la chanson.

 

Et c’est bien ainsi, dit Lucien l’âne, car il est temps de conclure. Reprenons notre tâche et tissons le linceul de ce vieux monde malade de la guerre, vantard, stupide et cacochyme.

 

Heureusement !

 

Ainsi Parlaient Marco Valdo M.I. et Lucien Lane

 

 

 

Lamme et Till sont en chemin.

Les nues frôlent la terre

Et glissent sous le vent de mer.

Le soleil est encore lointain.

 

À l’entrée de Lokeren, soudain,

L’alouette chante son refrain.

De la forge, le coq répond,

Une vieille voix lance son clairon.

 

C’est le smittte qui le jour forge

Des bêches, des pioches, des socs et roues à gorge

Et même, des grilles de belle fonte

Pour l’église et le château du comte.

 

Le smitte forge la nuit

Les armes pour nos amis.

« Vous deux, les amis, entrez sans façon

Et menez vos ânes derrière la maison. »

 

Le smitte emporte à la cave

La moisson de la nuit : épées et fers de lance.

Il dit : « Avez-vous des nouvelles du Taiseux ? »

Till dit : « Les mercenaires ont trahi. Reste les Gueux.

 

Gueux de mer et gueux de terre

Mèneront seuls cette guerre.

La liberté patientera, elle est bonne enfant.

Mais il faut des armes et de l’argent. »

 

Le smitte dit : « J’enverrai dès demain

Des armes et neuf mille florins.

Mais on recherche deux assassins de prédicants

Sur deux ânes califourchonnant. »

 

Till dit : « Lamme et moi, on a tué

Ces espions du duc, ces meurtriers payés

Pour assassiner le Prince de Liberté.

Voici, smitte, leur argent et leurs papiers. »

 

Le smitte dit : « C’est un plan de conspiration.

Ces papiers iront au prince à qui on dira

Qu’à Lamme et Till, la vie sauve il doit.

Cependant, il faut vendre les ânes sans hésitation.

 

Pour circuler incognito, il vous faut à chacun un métier.

Till fera, réparera et vendra des cages en osier.

Lamme fera et vendra des couques et des croustillons ».

Le smitte est un homme d’organisation.

 

La Ballade du Smitte
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Published by Marco Valdo M.I.
20 juillet 2018 5 20 /07 /juillet /2018 21:08

 

La Résistance des Folles-Filles

 

Chanson française – La Résistance des Folles-Filles – Marco Valdo M.I. – 2018
Ulenspiegel le Gueux –
70
Opéra-récit en multiples épisodes, tiré du roman de Charles De Coster : La Légende et les aventures héroïques, joyeuses et glorieuses d’Ulenspiegel et de Lamme Goedzak au Pays de Flandres et ailleurs (1867).
(Ulenspiegel –
III, XXVIII)

 

 

 

 

Dialogue Maïeutique

 

L’autre chanson, la précédente chanson de cette Légende de Till ressuscité racontait en quelque sorte le rapt de Lamme par les Folles-Filles en délire, commence Marco Valdo M.I.

 

Oui, je me rappelle très bien de cet essaim de demoiselles attentant en riant à la vertu du bon Lamme, dit Lucien l’âne. Et je me souviens aussi de la vigoureuse dénégation du bonhomme et de son incroyable argumentation. A-t-on idée d’imaginer que le fait d’être marié le protégerait de l’hystérie de ces bacchantes ?

 

Et pourtant, le brave homme persistait dans la défense de sa virginité maritale, continue Marco Valdo M.I. Il tient bon même quand il se fait proprement déshabiller et tripoter de tous les côtés par cette horde en rut. Pour un peu, on parlerait de viol.

 

Ah, dit Lucien l’âne, juste une remarque à ce sujet, il se dit que dans les usines ou les ateliers ou les groupes essentiellement composés de femmes, où ce sont des femmes aussi qui dirigent, il arrive que les jeunes hommes soient amenés à de telles extrémités. Dans le fond, c’est toujours la question du pouvoir et de la domination qui se pose et comme on le voit, elle est réversible.

 

Cependant, reprend Marco Valdo M.I., et c’est la fin de la chanson précédente, Lamme finit par « céder à la jeunette. »

 

En effet, dit Lucien l’âne, on en était là, à l’épisode de la reddition de Lamme. Mais qu’en est-il réellement ? Et que va-t-il se passer ensuite ?

 

Je m’en vas te le résumer, dit Marco Valdo M.I. ; en premier lieu, pour ce qui est de Lamme, la chanson te dira la vraie raison de sa reddition. En gros, c’est un odieux chantage de la baesine qui pousse Lamme au crime d’adultère. Ensuite, il te faut regarder le titre, car il dit l’essentiel. Ces demoiselles, dont je te rappelle que c’est le jour de liberté et qu’elles ne veulent que des amoureux qu’elles choisissent à leur goût, vont être attaquées par la bande des oiseleurs de passage qui voudront à toute force « consommer ». L’affaire finit en pugilat et Till et Lamme interviennent aux côtés de ces dames pour repousser les prétentions de ces intrus.

 

Oh, oh, dit Lucien l’âne, voilà qui est intéressant. C’est une fin de soirée assez agitée à ce que j’entends.

 

Pour les détails, il faut voir la chanson, reprend Marco Valdo M.I. et maintenant,je voudrais réfléchir un peu à la chose, à cette résistance des Folles-Filles, qui est aussi un vrai moment de la Guerre de Cent Mille Ans. C’est une résistance à l’agression des mâles en rut, à l’oppression qui frappe ces femmes à plus d’un titre. D’abord comme femmes ; ensuite, comme folle-fille qui doit – comme n’importe quel travailleur – vendre sa capacité de travail ; comme folle-fille encore quand elles revendiquent leur temps libre et leur liberté de choix, mais soudain, je me rends compte que nous ne sommes pas là pour en dire trop…

 

 

Oui, Marco Valdo M.I. mon ami, d’autant que j’ai parfaitement compris et que je compléterai, s’il en est besoin. Mais avant de conclure, je voudrais te fredonner un petit bout de La Complainte des Filles de Joie, chanson de Georges Brassens qui décrit assez justement leur situation :

 

« Bien que ces vaches de bourgeois
Bien que ces vaches de bourgeois
Les appellent des filles de joie
Les appellent des filles de joie
C’est pas tous les jours qu’elles rigolent
Parole, parole
C’est pas tous les jours qu’elles rigolent. »

 

Et maintenant, reprenons notre tâche et tissons le linceul de ce vieux monde vertueux, catéchisant, brutal, violeur, injuste et cacochyme.

 

Heureusement !

 

Ainsi Parlaient Marco Valdo M.I. et Lucien Lane

 

 

 

Ainsi, Lamme s’était rendu à la jeunette,

Mais pas sans raison.

« La battrez-vous à cause de moi, cette gamine ? »

« Jusqu’au sang, répond la baesine. »

 

« Mignonne, dit Lamme, si cette belle peau

Doit souffrir le fouet et le martyre,

Doncques, j’aime mieux te choisir

Que de voir saigner ton dos. »

 

Alors, en son antre, la fée se dépêche ;

Alors, le tendre Lamme pèche.

Ainsi, le doux Lamme fait œuvre pie

Comme il fit toute sa vie.

 

Till regarde la grande fille brune.

Elle coquète et fait mine

De ne pas vouloir de lui.

Chantons, dit Till et ils s’enchantent de ris.

 

Soudain, pénètrent en la maison

Se bousculant, se pressant, se poussant,

Sifflant, grondant, hurlant, vociférant,

Tout un tas de joyeux garçons.

 

Avec leurs sacs et avec leurs cages,

Avec leurs hiboux tout éwarés,

Avec leurs petits oiseaux emprisonnés,

Ce sont les oiseleurs de passage.

 

Beaux florins nous avons,

Belles filles nous voulons !

Qui recule est chapon,

En Brabant, duc est bon.

 

Demain, nous serons chiennes esclaves,

Aujourd’hui, nous sommes femmes libres.

Les belles ricassent : aujourd’hui, nous nous refusons.

Demain, pour l’argent, nous nous vendrons.

 

Et la bataille commence

Et les belles se défendent.

Till et Lamme à la rescousse entrent

À coups de balai dans la danse.

 

Les ivrognes battus se lassent

Et dorlotés par les laides, les enlacent.

Quand tous, ruinés, sont chassés au matin,

Till et Lamme sont depuis longtemps en chemin.

La Résistance des Folles-Filles
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Published by Marco Valdo M.I.
19 juillet 2018 4 19 /07 /juillet /2018 20:36

 

LE CULTE

Version française – LE CULTE – Marco Valdo M.I. – 2018

d’après la version italienne – CULTO de Riccardo Venturi – 2018

d’une chanson polonaise – KultGrzegorz Dąbrowski – 2018

 

 

 

 

Et pour la vieillesse, le culte du Rosaire

 

 

 

 

Dialogue Maïeutique

 

Lucien l’âne mon ami, depuis Alfred Jarry (1873-1907), on n’en finit pas de découvrir l’étrangeté de la Pologne, pour ne pas dire sa bizarrerie. Étrangeté et bizarrerie qui touche particulièrement ses figures les plus célèbres. On vit même récemment encore un Polonais promener sa robe dans les allées du Vatican et sur les avenues du monde entier. On en a fait – en Pologne – tout un culte. Mais enfin, pour le Polonais moyen, ce n’est pas rédhibitoire. Par exemple, on peut naître Polonais, être un homme et vivre en Pologne tout en participant à la grande fête commune de la vie, nonobstant ce vieux monde cacochyme. J’en tiens pour preuve notre ami Krzysiek.

 

Certes, Marco Valdo M.I., il doit bien y avoir des Polonais heureux. Aleksandar Petrović avait bien rencontré des Tziganes heureux. Cependant, sans être aussi informé de la Pologne que le Père Ubu qui, dans sa grande sagesse, disait : « S’il n’y avait pas de Pologne, il n’y aurait pas de Polonais ! », j’ai ouï dire que la Pologne était affectée d’une sorte de maladie du culte et du rite qui lui a souvent valu de glorieuses heures et certains héros de dimensions peu ordinaires.

 

Lucien l’âne, tu es perspicace ou devin, car c’est de cela même que parle la chanson qui, comme il ressort de sa langue, est véritablement polonaise et tout à fait contemporaine. Je m’en vais te montrer à coups de citations rapides que la Pologne, disons officielle, a montré fort souvent un esprit digne du père du Roi Ubu . Pour mieux comprendre, allons voir le moment originel quand Ubu lui-même (c’est le début d’Ubu Roi ou Les Polonais, la pièce que Jarry publia en 1896) se refuse à tuer le roi Venceslas pour lui succéder, la Mère Ubu, son épouse, qui connaît bien aussi certaines ambiances de ces lieux, lui suggère, mais voyons les répliques :

 

« PÈRE UBU
De par ma chandelle verte, le roi Venceslas est encore bien vivant; et même en admettant qu’il meure, n’a-t-il pas des légions d’enfants ?

MÈRE UBU
Qui t’empêche de massacrer toute la famille et de te mettre à leur place ?

PÈRE UBU
Ah ! Mère Ubu, vous me faites injure et vous allez passer tout à l’heure par la casserole.

MÈRE UBU
Eh ! pauvre malheureux, si je passais par la casserole, qui te raccommoderait tes fonds de culotte ?

PÈRE UBU
Eh vraiment ! et puis après ? N’ai-je pas un cul comme les autres ?

MÈRE UBU
À ta place, ce cul, je voudrais l’installer sur un trône. Tu pourrais augmenter indéfiniment tes richesses, manger fort souvent de l’andouille et rouler carrosse par les rues. »

 

Et dans la présentation de la pièce, l’auteur prévient : « Le scène se passe en Pologne, c’est-à-dire nulle part. »

 

En Pologne, c’est-à-dire nulle part, c’est-à-dire, autrement dit, à peu près n’importe où, dit Lucien Lane. N’importe où dans notre monde ubuesque où les Chefs d’État font un concours à qui égalera Ubu. Je ne donnerai aucun nom mais puisqu’on a cité la Pologne, citons les États : USA – qui mène la course à l’imbécillité, la Russie – ex-URSS, la Turquie, le Congo (RDC), l’autre aussi, mais c’est moins voyant, la Syrie, la Chine, l’Inde … J’arrête là, je n’en finirais pas. Mais avec cette excursion dans la Pologne d’Ubu, on ne sait toujours pas de quoi cause la chanson.

 

Ho, Lucien l’âne mon ami, ne dis pas cela, car avec Ubu, on ne s’est pas égaré du tout. La chanson évoque le culte sous toutes ses formes ; j’ajoute, évoque et critique vertement le Culte et on comprend son auteur, puisqu’il est Polonais et que pour ce qui est du Culte, comme je l’ai dit plus haut, la Pologne ne craint personne, surtout depuis qu’après avoir connu un général-Président, sa tête est affublée d’un essaim de culs bénits qui la feront – si on ne les retient pas à temps – tomber dans le trou du Culte national et catholique.

 

Soit, cette perspective de national-catholicisme, Marco Valdo M.I. mon ami, n’a rien de réjouissant, d’autant qu’un même goût pour le Culte s’est développé chez certains de ses voisins. Mais passons à la chanson et puis, reprenons notre tâche qui est de tisser le linceul de ce vieux monde ubuesque, réactionnaire, nationaliste, passionné de culte et cacochyme.

 

Heureusement !

 

Ainsi Parlaient Marco Valdo M.I. et Lucien Lane

 

 

 

Le culte de la Bentley, le culte de l’Église
Le culte de l’Armée et le culte du Prêtre

 

Le culte du Chef, le culte de la Liberté
Le culte du Commandement et le culte du Pouvoir

 

Le culte de l’Honneur, le culte de la Hiérarchie
Le culte de la Démocratie et le culte du Parti

 

Le culte du Football, le culte de la Série
Le culte de l’Indépendance, le culte de la Race blanche

 

Le culte de l’Histoire, le culte de la Politique
Le culte de la Science, le culte de la Musique pop

 

Le culte de la Télévision, le culte des Célébrités
Le culte des Acteurs, le culte des Stylistes

 

Le culte de la simulation, le culte du silicone
Le culte du lifting, le culte des corps rajeunis

 

Le culte d’Internet, le culte de l’Écran
Le culte de la Consommation, le culte de la Pub.

 

Le culte de l’Argent, le culte du Bien-être
Le culte du Luxe, le culte du Crédit.

 

Le culte de la Vitesse, le culte du Progrès
Le culte de la pilule et du Relax.

 

Le culte de la Bouffe et le culte de la Danse
Et pour la vieillesse, le culte du Rosaire.

 

 

 LE CULTE
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Published by Marco Valdo M.I.
18 juillet 2018 3 18 /07 /juillet /2018 21:50

 

Le Rapt de Lamme

 

Chanson française – Le Rapt de Lamme – Marco Valdo M.I. – 2018
Ulenspiegel le Gueux –
69
Opéra-récit en multiples épisodes, tiré du roman de Charles De Coster : La Légende et les aventures héroïques, joyeuses et glorieuses d’Ulenspiegel et de Lamme Goedzak au Pays de Flandres et ailleurs (1867).
(Ulenspiegel –
III, XXVIII)

 

 

 

 

 

 

Dialogue Maïeutique

 

Tu te souviens certainement, Lucien l’âne mon ami, qu’on avait laissé Lamme et Till , lors de cette mémorable soirée à Anvers, devant une maison aux rideaux jaunes et à la lanterne rouge, un couvent de nonnains du diable où supposait-on, se démènent « Quinze belles amoureuses amènes » et la fin de la chanson laissait penser que Till entendait bien y entrer et y entraîner Lamme assez dolent.

 

Je me souviens, dit Lucien l’âne en riant, et je suppose qu’ils y sont entrés : l’un de bon gré, l’autre moins enthousiaste. Et je suppose que c’est cette suite de soirée que raconte cette nouvelle chanson.

 

En effet, Lucien l’âne mon ami. Donc, Till entraîne Lamme dans la maison en question et lui-même ayant trouvé une compagne pour la soirée se retire dans une pièce du haut et Lamme doit seul affronter cet essaim de demoiselles en mal d’amour.

 

Comment ça « en mal d’amour » ?, s’étonne Lucien l’âne.

 

Figure-toi, dit Marco Valdo M.I. que Till et Lamme arrivent dans cet étrange couvent, précisément le jour où ses nonnains d’amour ont leur organisation de vie et disposent ainsi d’une journée de repos, d’une journée à elles, qu’elles peuvent partager comme bon leur semble. Et comme le reste de leur vie est consacrée aux amours tarifées, ce jour-là, elles entendent bien faire régner l’ère de la gratuité et de l’amour pour l’amour et comme dit Brassens, elles rejoignent les « Vénus de la vieille école, Celles qui font l’amour par amour. » Cependant, Lamme reste sourd à leurs propositions et tente de s’échapper. Alors, elles vont tout simplement le rapter et l’obliger à sacrifier aux charmes de la plus jeune d’entre elles. Et Lamme, l’homme fidèle à sa femme invisible, y consentira.

 

Ça laisse songeur, dit Lucien l’âne. Mais je suis persuadé que le bon Lamme s’en remettra.

 

Oh, dit Marco Valdo M.I., d’autant plus que dans le récit de la Légende, le brave Lamme est sauvé en quelque sorte par le gong, car une bagarre va éclater dans le vertueux établissement au moment où une bande d’oiseleurs ivres vont tenter de violenter les « amoureuses de la gratuité » qui ne les trouvent pas à leur goût, moment que Till et Lamme mettront à profit pour s’éclipser. Comme tu le verras, tout ceci n’est pas dit dans la chanson, la rirette, la rirette.

 

Et pourquoi donc ?, demande Lucien l’âne.

 

Tout simplement, dit Marco Valdo M.I., car malgré la longueur de cette chanson en multiples morceaux (on en est au soixante-neuvième épisode), il me faut condenser extrêmement la Légende qui fait près de 600 pages bien remplies, dans l’édition que j’utilise. Dès lors, je suis forcé d’élaguer et le résultat en est que si c’est finalement la même Légende, c’est une tout autre histoire : celle du combat de Till pour la liberté humaine – face à tous les cultes, face à tous les pouvoirs. Comme on l’a constaté jusqu’ici, ce combat passe par tous les moments de la vie et ne se résume pas aux seuls moments héroïques ou strictement « engagés ». La Guerre de Cent Mille Ans, comme on le sait, se déroule partout et toujours, au cœur de la soi-disant paix, jusque dans le for le plus intérieur de chaque individu. Dans le fond, tout moment en est un moment, tout geste en est un geste. Tel est le sens de cette geste de Till qui s’y inscrit totalement.

 

Ainsi, dit Lucien l’âne, toute chanson s’inscrit – consciemment ou non – dans le récit de cette Guerre cent-millénaire. Tout comme nous d’ailleurs qui tissons inlassablement le linceul de ce vieux monde cent-millénaire, guerrier, violent et cacochyme.

 

 

Heureusement !

 

Ainsi Parlaient Marco Valdo M.I. et Lucien Lane

 

 

 

 

 

 

Till dit : « Il faut te divertir. »

Lamme répond : « J’aimerais mieux dormir. »

Till dit alors : « Entrons donc dans ce couvent,

Un petit bossu y joue du clavecin grinçant.

 

Les quinze belles demoiselles sont là

Penchées, accoudées, couchées ;

Jambe de ci, jambe de là,

Jusqu’au milieu du corps dénudées.

 

« Pas de monnaie aujourd’hui, on n’en veut pas.

C’est l’amour qu’il nous faut ;

Amour, amour de qui nous plaira ;

Sans payer, amour nouveau, amour tout beau.

 

Hier, il fallait seulement payer

Pour nous avoir ;

Maintenant, il faut aimer boire

Vin et baisers et rêver.

 

Le cœur bat dans la poitrine,

C’est l’horloge des baisers.

Pour l’heure, jouvencelles coquines,

Nous sommes filles de charité. »

 

« Till mon ami, où es-tu ?

Ne me laisse pas seul ici.

Till, tu as disparu,

Où es-tu parti ? »

 

« Ton ami est dans la chambre à côté

Où il est fort occupé.

Comme Jacob van Maerlant de Damme,

Il aime à lutiner les dames.

 

« Lamme, Lamme, disent les donzelles,

Lamme, Lamme, tu ne partiras pas !

Lamme, Lamme, reste là !

Lamme, Lamme, sinon on nous battra. »

 

Les minces et les dodues, les belles et les laides,

Les rousses, les noires, les brunes et les blondes

Jettent en l’air son manteau et le tirent sur le lit,

Elles posent des baisers sur sa peau – malgré lui.

 

« Je suis marié, crie Lamme.

Je tiens tout pour ma femme. »

« Tu dois choisir ou on te fouette »

Et Lamme se rend à la plus jeunette.

Le Rapt de Lamme
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Published by Marco Valdo M.I.
17 juillet 2018 2 17 /07 /juillet /2018 21:37

 

RICHARD BRÛLE

 

Version française – RICHARD BRÛLE – Marco Valdo M.I. – 2018

d’après la version italienne – RYSZARD ARDE – de Krzysiek Wrona – 2017

d’une chanson polonaise - Ryszard płonie - Antybiotyka - 2015

Paroles et musique : Krzysztof Rodak
Morceau dédié à la mémoire de Ryszard Siwiec.

 

 

 

 

 

Ryszard Siwiec (Richard Siwiec), 1909-1968, né à Dębica et mort à Varsovie, est un comptable, professeur et ancien soldat polonais. Il fut la première personne à s'immoler par le feu en protestation contre la «normalisation » qui suivit le Printemps de Prague (1968) en Tchécoslovaquie. Pour protester contre l'entrée à Prague des troupes du Pacte de Varsovie devant des dizaine de milliers de personnes, des officiels du parti et alors que la manifestation est retransmise à la télévision nationale, il s'immole dans les gradins. Son geste fut vu en direct par plus de 100 000 spectateurs, dont les dirigeants du pays et les diplomates étrangers qui avaient été invités pour ce spectacle de propagande. Il mourut quatre jours plus tard.

 

Il était père de cinq enfants et originaire de Przemyśl. Il avait préparé son action, laissant des enregistrements audio pour exprimer son dégoût devant l'intervention des armées du Pacte et la participation des armées polonaises, et envoyant une lettre d'adieu à sa femme, écrite dans le train pour Varsovie.

Son acte a pu être un déclencheur pour l’immolation des Tchèques Jan Palach et Jan Zajíc, mais il est impossible de savoir si la police politique communiste a pu étouffer complètement l'événement. Selon la version officielle, il s'agissait uniquement du geste de quelqu'un « souffrant de maladie mentale ». Bien que son acte ait été enregistré par les caméras présentes au festival, les journaux n'en ont pas parlé et la chose a été largement connue plus tard, quand la nouvelle a été diffusée par Radio Free Europe.

(Extrait de Wikipedia – Ryszard Siwiec)

 

 

 

Au stade, tous les gens présents
Pensent que c’est un fou qui brûle, et cependant
Entre les agents de la sécurité,
Un homme s’immole pour l'humanité

 

Regardez, Richard brûle :
Ses cheveux brûlent, ses mains brûlent.
Regardez là, c’est Richard qui brûle
Et pourtant, personne ne voit rien.

 

 

Regardez, Richard brûle :
Ses cheveux brûlent, ses mains brûlent.
Regardez là, c’est Richard qui brûle
Et pourtant, personne ne voit rien.

 

Et ce feu est un remède
Il éclaire sur le mensonge des « - ism
es »
Qu
e révèle
Le nom de République Populaire

 

 

Regardez, Richard brûle :
Ses cheveux brûlent, ses mains brûlent.
Regardez là, c’est Richard qui brûle
Et pourtant, personne ne voit rien.

 

 

Regardez, Richard brûle :
Ses cheveux brûlent, ses mains brûlent.
Regardez là, c’est Richard qui brûle
Et pourtant, personne ne voit rien.

 

 

Aucune clarté, aucun souffle
Au milieu de la sombre terreur des services
Ne réussit à éteindre ce feu,
Il brûle pour notre liberté

 

 

Regardez, Richard brûle :
Ses cheveux brûlent, ses mains brûlent.
Regardez là, c’est Richard qui brûle
Et pourtant, personne ne voit rien.

 

 

Regardez, Richard brûle :
Ses cheveux brûlent, ses mains brûlent.
Regardez là, c’est Richard qui brûle
Et pourtant, personne ne voit rien.

 

RICHARD BRÛLE
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Published by Marco Valdo M.I.
16 juillet 2018 1 16 /07 /juillet /2018 21:20

 

FAUDRA-T-IL ENCORE ATTENDRE 

 

LONGTEMPS ?

 

 

 

Version françaiseFAUDRA-T-IL ENCORE ATTENDRE LONGTEMPS ? – Marco Valdo M.I. – 2018

d’après la version italienne QUANTO DOVREMO ASPETTARE ? de Riccardo Venturi – 14-07-2018 13:28 (41°C)

d’une chanson suédoise – Hur länge ska vi vänta Hoola Bandoola Band1975
Auteur :
Mikael Wiehe

 

 

 

 

Le meilleur des mondes possibles ?

 

 

 

 

Dialogue Maïeutique

 

Voici, Lucien l’âne mon ami, une chanson qui s’inscrit tout à fait dans le même sens que la Guerre de Cent Mille Ans [[7951]] ; en fait, elle en est une illustration fidèle. Elle se présente comme une complainte de ceux qui doivent tout supporter dans réagir sous peine des plus vives ou des plus sournoises rétorsions. Elle pourrait se définir comme la Complainte des Pauvres ou comme elle le dit elle-même, des déshérités.

 

« Les enfants des déshérités vivent
Juste assez pour vieillir et mourir »

 

Par parenthèse, on trouve dans ces deux vers toute la problématique des pensions et la terrible pression exercée actuellement par le pouvoir (des riches et des puissants) pour allonger la durée de l’obligation de travailler (en clair et en français, du Service de Travail Obligatoire, connu sous l’acronyme sinistre STO).

 

Oh, dit Lucien l’âne, c’est d’une logique assez décapante : avec l’allongement de la durée de vie, le système des pensions bénéficie trop aux pauvres ; il s’agit faire coïncider au mieux – durée de travail et durée de vie. Cyniquement, on pourrait dire que les humains (spécifiquement, les pauvres, évidemment) vivent trop vieux. Quant à la Guerre de Cent Mille Ans, je sais qu’elle est menée systématiquement par les riches contre les pauvres, afin d’assurer leur pouvoir, d’étendre leur domination, de renforcer leurs privilèges et de multiplier leurs richesses.

 

Et ce qui est intéressant, avec cette chanson, dit Marco Valdo M.I., c’est qu’elle a été écrite, il y a presque un demi-siècle, bien avant la Guerre de Cent Mille Ans et dans un pays et une langue nordiques et qu’il a fallu attendre les Chansons contre la Guerre et leur travail inlassable de compilation internationale et leur œuvre de multi-traduction pour qu’elle nous parvienne enfin. Évidemment, ma version française est une version établie à partir de la traduction italienne et de ce fait, comme de plus j’ignore totalement le suédois (et que je n’ai pas le temps de l’apprendre), je ne peux que dire qu’il s’agit d’un écho de cette voix lointaine.

 

Certes, Marco Valdo M.I. mon ami, mais c’est le lot de la plupart des chansons du monde et il ne pourrait en être autrement à partir du moment où l’humanité parle et écrit (mais pas toujours) des centaines de langues différentes. Si l’on veut savoir ce qui se dit ou s’écrit ailleurs, il faut nécessairement traduire et comme on l’a déjà souligné ici : « Mieux vaut une mauvaise version que pas de version du tout. »

 

Avant de te laisser conclure, Lucien l’âne mon ami, je veux te dire que cette canzone – qui pour l’essentiel est une lamentation qui raconte cette guerre civile qui occupe l’humanité – toutes nations confondues – depuis tant de temps, vue du point de vue des pauvres, se termine néanmoins sur une conclusion assez optimiste que je t’invite à découvrir.

 

Alors à présent, reprenons notre tâche et tissons le linceul de ce vieux monde prometteur de beaux jours, avide, arrogant, faussement généreux, oppressant et cacochyme.

 

Heureusement !

 

Ainsi Parlaient Marco Valdo M.I. et Lucien Lane

 

 

 

 

Nous les avons supportés très longtemps, très !
Et même tolérés trop, trop près !
Ces gens qui se sont accaparé le pouvoir
Et maintenant jouent les gardes suisses

Ceux qui, quand on veut changer quelque chose,
Disent qu’il faut garder l’espoir
Et ensuite, se hâtent tellement lentement
Que finalement, ils n’avancent aucunement.

 

Longtemps, nous avons écouté leurs promesses
D’un nouveau et meilleur des mondes.
Oui, ils nous ont promis un paradis sur terre
Mais tout ce que nous avons vu, c’est Saint-Pierre.
Si longs que soient les jours,
Le temps est toujours trop court,
Car ceux qui nous ont fait ces promesses
Savent seulement bavarder.

Combien de temps faudra-t-il attendre ?
Combien d’années devront-elles passer ?
Combien de temps faudra-t-il attendre
Avant que notre futur soit nôtre ?

 

Les enfants des déshérités vivent
Juste assez pour vieillir et mourir,
Et ceux qui, comme maintenant,
Ont plus que le suffisant,
Peuvent se prolonger aisément.
Mais plus encore que leur avidité,
Nous blesse la générosité des riches
Quand leur main droite récupère le double
De ce que donne leur main gauche.

 

Combien de temps faudra-t-il attendre ?
Nous comptons chaque jour.
Combien de temps faudra-t-il attendre
Avant que notre futur voie le jour ?

 

Il y a celui qui se bat pour le droit
De pouvoir raconter ce qu’il voit
Quand ce qui arrive enfin cesse,
Il peut fermer ses yeux sans faiblesse
Et celui qu’on chauffe à l’aide d’électrodes
Jusqu’à ce que son corps, de spasmes, se torde.
Résiste encore, et

Refuse de se laisser museler.
D’autres se battent contre leur peur
Et luttent contre la terreur.
À mains nues, ils affrontent
Les boucliers et les matraques.

D’autres encore donnent de la voix
Pour que nous suivions leur voie.
C’est pour eux que nous voulons
Chanter nos chansons.

Oui, le monde avance,
Chaque jour qui passe,
Nous entendons les cris de lutte.
Quand le vent souffle,
Nous qui avons soif d’amour comme pain,
Comme tous les autres, nous avons faim
Et il nous faut lutter seuls pour nous libérer
Quand nous voudrions tant aider.

 

Le jour où nous serons fatigués
D’être opprimés par eux,
De toutes leurs promesses sans lendemain,
De toutes les histoires du monde vieux,
Les charlatans et les magiciens
Exhaleront leur dernier souffle,
Et ils imploseront comme les gnomes,
Quand le soleil se lève.

Combien de temps faudra-t-il attendre ?
Combien de jours devrons-nous compter ?
Combien de temps faudra-t-il attendre
Pour voir notre avenir triompher ?

 

 

FAUDRA-T-IL ENCORE ATTENDRE LONGTEMPS ?
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