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15 septembre 2009 2 15 /09 /septembre /2009 10:55

LE ROI EST NU

 

Version française – LE ROI EST NU – Marco Valdo M.I. – 2009

Chanson italienne – Il Re è Nudo – Nomadi – 2002

 

 

Mais tu ne fais pas un peu d'effort

Derrière cette veste sombre

Avec ce nœud au cou, excuse,

Tu n'as pas pitié de toi

Et tu ne vois pas ce sourire

De campagne électorale

Et que dire de ta voix

Consciencieuse et impersonnelle.

 

Si le triomphes te suffisent

Dans un royaume de carton

À nous, par contre, il faut du sens

Il faut de l'émotion.

Le fait est que comme tout le monde

Tu es nu sous le soleil.

 

Le Roi est nu,

Mais le Roi ne le sait pas.

Il passe parmi les gens

Et salue en souriant.
Le Roi est nu

Mais al vérité

Est qu'il plaît au Roi de jouer de son bouclier spatial.

Le Roi est nu,

Mais la vérité

Est que personne ne peut le dire à sa majesté.

 

J'ai seulement envie de parler

Je ne te demande pas ton opinion

Et moins encore la raison

De ta tranquillité.

Je voudrais me rendre compte

Où tu regardes et ce que tu vois

Et si avec ces quatre restes

Tu arrives à monter un cœur.

Par faveur, laisse tomber

Défends-toi de la douleur.

 

 

Le Roi est nu,

Mais le Roi ne le sait pas.

Il passe parmi les gens

Et salue en souriant.
Le Roi est nu

Mais al vérité

Est qu'il plaît au Roi de jouer de son bouclier spatial.

Le Roi est nu,

Mais la vérité

Est que personne ne peut le dire à sa majesté.

 

Mais regarde quel sourire

De campagne électorale

Les triomphes lui suffisent

dans un royaume de carton

À nous au contraire, il faut un sens

Peut-être une révolution.

 

Le Roi est nu,

Mais le Roi ne le sait pas.

Il passe parmi les gens

Et salue en souriant.
Le Roi est nu

Mais al vérité

Est qu'il plaît au Roi de jouer de son bouclier spatial.

Le Roi est nu,

Mais la vérité

Est que personne ne peut le dire à sa majesté.

 

Le Roi est nu,

Mais le Roi ne le sait pas.

Il passe parmi les gens

Et salue en souriant.
Le Roi est nu

Mais al vérité

Est qu'il plaît au Roi de jouer de son bouclier spatial.

Le Roi est nu,

Mais la vérité

Est que personne ne peut le dire à sa majesté.

 

Le Roi est nu

Nu

Le Roi est nu

 

Le Roi est nu,

Mais le Roi ne le sait pas.

Il passe parmi les gens

Et salue en souriant.
Le Roi est nu

Mais al vérité

Est qu'il plaît au Roi de jouer de son bouclier spatial.

 

Si les triomphes te suffisent

Dans un royaume de carton

À nous, par contre, il faut un sens

Il faut de l'émotion.

 

Le Roi est nu,

Mais le Roi ne le sait pas.

Il passe parmi les gens

Et salue en souriant.
Le Roi est nu

Mais al vérité

Est qu'il plaît au Roi de jouer de son bouclier spatial.

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14 septembre 2009 1 14 /09 /septembre /2009 17:53

Ombres Noires

 

Canzone léviane – Ombres Noires – Marco Valdo M.I. – 2009

Cycle du Cahier ligné – 51

 

 

Ombres Noires est la cinquante et unième chanson du Cycle du Cahier ligné, constitué d'éléments tirés du Quaderno a Cancelli de Carlo Levi.

 

Lucien, mon ami l'âne aux yeux plus noirs qu'une nuit orientale sans lune, écoute-moi bien, car ce soir, je vais te dire des choses secrètes et étranges. Et surtout, ne m'interromps pas trop souvent.

 

Marco Valdo M.I., j'ai beau être ton ami et dès lors, bien te connaître, tu m'intrigues... Mais ne t'inquiète pas, je vais t'écouter de toutes mes oreilles qui, comme tu peux le voir, dit l'âne Lucien en dressant à la verticale sa belle paire toute noire, sont grandes et fort bien dressées. Mais je t'en prie... Dis-moi donc !

 

Donc, comme tu peux le voir, cette fois-ci notre guerrier-blessé-malade-prisonnier... parle comme un chœur.

 

Un peu comme chez Aristophane dont j'ai vu l'une ou l'autre fois une pièce ou comme chez d'autres auteurs grecs, dont je me souviens d'avoir assisté à des représentations dans l'un ou l'autre amphithéâtre en plein air à la tombée du jour ou comme chez Verdi où j'ai même vu un chœur d'esclaves...

 

Peu importe, pourvu qu'il y ait un chœur. Le chœur représente généralement le peuple, mais ici, c'est un chœur de guerriers. Certains sont morts, d'autres sont blessés, malades, prisonniers... Ce sont des guerriers qui ont connu la défaite et vaincus et prisonniers, ils entreprennent de résister aux « ombres noires ». Que sont-elles ? Il faut laisser parler la poésie... Moi, je crois que ce sont aussi des entités symboliques qui rappellent les ennemis réels qui sont habillés d'uniformes noirs; ces ennemis qui jettent les ombres noires sur le monde. Maintenant, connaissant l'ensemble du cycle du Cahier ligné, on sait nettement qui sont ces ennemis, de quel côté ils se situent. Notre guerrier aussi, dès lors.

 

Ah, dit Lucien l'âne aux allures par moment sauvages, mais encore...

 

Eh bien, voici. Il me semble que notre guerrier et tous ceux de son chœur sont en fait engagés dans la Guerre de Cent Mille Ans... du côté des pauvres. Tu sais, Lucien mon ami, que cette guerre-là est celle que les riches, afin d'assurer leurs privilèges, leur domination et d'imposer leur conception délirante du monde, mènent contre les pauvres.

 

Il faut bien dire que jusqu'à présent, ils ont plutôt réussi, dit Lucien l'âne.

 

En effet, mais l'affaire n'est pas terminée. C'est une longue guerre, dont je t'ai déjà dit qu'elle ne se terminera que le jour où l'homme sera devenu humain et aura abandonné toute prétention à la domination et à la propriété... En attendant, tissons le linceul de ce monde vieillissant et cacochyme.

 

Ainsi Parlaient Marco Valdo M.I. et Lucien l'âne

 

Guerriers pétrifiés, gisant ainsi,

Presque morts, nous attendons notre tour

D'être mangés par nos vautours

Qui emporteront nos os blanchis,

Ou enlevés par des nomades noirs

Qui peut-être nous épargneront

Pour revendiquer une rançon

Ou par pure hospitalité barbare,

Ou nous sacrifieront à leurs dieux assoiffés.

Comateux, souffrants, nous nous sommes traînés

Et cachés dans le labyrinthe hospitalier.

Quand revient le resserrement des paupières.

Les ombres noires ne nous émeuvent plus,

Elles ne sont plus qu'images et mystères.

La clarté efface le temps perdu.

 

Nous nous ressemblons

Nous sommes ici et nous savons

Cela que si nous ne mourons pas

C'est que nous ne désespérons pas.

Nous avons la volonté de ne pas céder et de tenir

Alors, reviennent les forces et les désirs

Le goût d'un aliment, le plaisir.

Face à l'opaque apathie de l'épouvante

La peur de la lumière disparaît,

Les humeurs de la nuit s'éventent,

L'instinctif plissement du visage renaît

Quand revient le resserrement des paupières.

Les ombres noires ne nous émeuvent plus,

Elles ne sont plus qu'images et mystères.

La clarté efface le temps perdu.

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13 septembre 2009 7 13 /09 /septembre /2009 10:12

LE LAVEUR DE VITRES

Version française – LE LAVEUR DE VITRES – Marco Valdo M.I. – 2009

Chanson italienne – Il Lavavetri – Il Parto delle Nuvole Pesanti – 2004

 

 

On le connaît tous celui-là qu'on voit dans les grands carrefours des villes et des faubourgs, perdu dans les flots absurdes des autos, qui comme les bancs de harengs s'en vont vers leur destruction. On la connaît de vue et de vue seulement, cette silhouette anonyme qui s'agite telle une marionnette dont un destin hésitant tire les fils.

 

Nous les ânes, nous les ânes, dit Lucien aux yeux de braise andalouse, on n'est pas du même bois d'acier et de plastique que leurs machines et nos yeux sont toujours brillants et se nettoient tous seuls, avec nos propres larmes.

 

Donc, Lucien mon ami, tu as raison, pour les autos, il y faut la main de l'homme. Les vitres des autos s'encrassent continuellement et s'emplissent de poussières et de toutes sortes d'insectes, de graisses... Et les essuieglaces n'en enlèvent qu'une partie, de sorte que seule la main et l'éponge peuvent en venir à bout. Mais vois-tu, à l'autre extrémité de la main, il y a le laveur de vitres. Un personnage des villes comme je te l'ai dit. Indispensable pour le bon ordre social, pour rappeler les écarts qui existent entre les humains du haut et les humains du bas de l'échelle. Que serait la richesse des nantis et des nés natifs, s'il n'y avait ce « laveur de vitres » pour rappeler qu'il y a des gens plus bas qui doivent faire n'importe quoi pour survivre. Des gens venus d'ailleurs, qui ont tout juste le choix de s'écraser et de dire merci. Tu vois Lucien, il y a vivre... la vie réservée à ceux qui en ont et … survivre, la survie à peine tolérée de ceux qui n'en ont pas. La guerre sociale est une guerre de tranchées et de carrefours. Vae victis !

 

Toujours, cette Guerre de Cent Mille Ans que les riches mènent contre les pauvres... Tissons, tissons le linceul de ce vieux monde en putréfaction... et qui se traîne pouf, pouf...

 

Ainsi Parlaient Marco Valdo M.I. et Lucien l'âne.

 

Avec son éponge à la main

Et la mousse dans son éponge

Il a dans les yeux le parebrise

De cette auto qui vient

Et puis s'en ira.

Appuyé à un muret,

Il met ses songes dans son seau

Il s'approche des moteurs

Comme un chat qui se réchauffe

Et puis s'en va.

 

Et il lave, lave, lave

Les vitres de cette auto bleue

Qui maintenant est arrêtée au rouge

Et dans un instant sera déjà loin de toi

 

Il lave les vitres et il est content

Il ne se soucie pas du tourment

D'un travail dépourvu de sens

De celui qui dit « Noonn! »

Et puis s'en va.

Mais lui, il voyage avec la tête

Il se réfugie dans son enfance

Quand le futur encore

Était le bonheur

Le bonheur.

 

Et s'ouvre, s'ouvre la fenêtre

Et lentement la petite main

Fait tomber une piécette

Le premier euro pour le laveur « Olé! »

 

Mais une violente et soudaine

Averse de saison

Lave les yeux du laveur

Lui susurre des choses étranges

Et puis s'en va.

 

Et il lave, lave, lave

Le cœur de cet homme en bleu

Qui maintenant est suspendu au privilège

Et dans un instant

Sera déjà tombé « Olé ».

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11 septembre 2009 5 11 /09 /septembre /2009 13:23

L'HOMME DE MUNICH


Version française - L'HOMME DE MUNICH – Marco Valdo M.I. – 2009

Chanson italienne – L'Uomo di Monaco – Nomadi - 1988

« Sur le mur, on avait écrit à la craie :

Ils veulent la guerre.

Celui qui l'a écrit

Est déjà tombé. »

(Bertolt Brecht)

 

 

Je regardais, je scrutais ce vieillard à Munich

Ce sourire, cette bière, je pensais à tant de choses,

Ma mémoire allait à une foule de regards fixes

Derrière ces fils barbelés.

Je l'épiais, je le scrutais, j'imaginais des uniformes,

Un qui marcha, qui piétina l'Europe

Ma mémoire allait à une foule de regards fixes

En dehors de ces fils barbelés.

Je le regardais

Au fond de ses yeux

Je le fixais

En insistant toujours plus

Pour voir si c'était

De la faute ou de la peur.

Pourquoi ? Pour quelle raison ?


Et regarde, je scrutais, je ne notais rien

Sinon des rides sur son visage, semées par le temps,

Il n'avait pas de griffes, ses mains tremblaient

Comme celles de mon père.

Je le regardais

Au fond de ses yeux

Je le fixais

En insistant toujours plus

Pour voir si c'était

De la faute ou de la peur.

Pourquoi ? Pour quelle raison ?

Je retournais ensuite encore à Munich.

Je le cherchais, mais désormais, il n'y était plus.

Ma mémoire, cette foule, ces mains,

Entre deux vols de mouettes.

Ma mémoire, cette foule, ces mains,

Entre deux vols de mouettes.

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10 septembre 2009 4 10 /09 /septembre /2009 21:25

LA CARAVANE

Version française - LA CARAVANE – Marco Valdo M.I. – 2009

Chanson italienne – La Carovana – Talco



« Entrez, entrez » dans la crue réalité

Où un lamento désarmé m'a touché

Éveille-toi marionnette, voici là

Sur le gouffre de la mondanité

Ici dans la boue d'une fausse réalité

Qui vend encore l'or même quand c'est de la boue

Dort le temps abandonné à la lâcheté

Du qualunquisme occidental.

Je pars suivre une utopie

Que des regards épuisés ne verront pas

Je crains que ta démocratie

Avec le feu supporte pas la liberté.

Il est peut-être tard, mais je m'en vais

Recoudre les vides de votre hypocrisie

Dans ma ville, la caravane vient

Apportant la solidarité.

 

Vous, rêveurs, faites comme moi

Pour faire un saint, il n'y a pas besoin de dieu

Solidarité, moi, je m'en vais là

Pour réparer les vides de votre fausseté.

Ici il y a encore une ville

Elle se coule dans l'innocence

J'ai suivi une ville

Parmi les ruines d'un monde submergé.
Ici , il y a encore une ville.

Ma ville.

Ils disent ma vérité

Menteuse, irrévérente et extrémiste.

Tout, mais je ne peux tolérer

Qu'une conscience soit aveugle, car elle a cessé de crier

Peuples et villes fracassés

Par le fantôme de la guerre et de l'économie

Dans ma ville, j'apporte l'humanité

Aux journées mutilées de votre civilisation.

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10 septembre 2009 4 10 /09 /septembre /2009 14:25

Le Radeau de Lampéduse

 

Canzone léviane – Le Radeau de Lampéduse – Marco Valdo M.I. – 2009

Cycle du Cahier ligné – 50

 

 

Le Radeau de Lampéduse est la cinquantième chanson du Cycle du Cahier ligné, constitué d'éléments tirés du Quaderno a Cancelli de Carlo Levi.



Le Radeau de Lampéduse est la cinquantième chanson du Cycle du Cahier ligné, constitué d'éléments tirés du Quaderno a Cancelli de Carlo Levi.



Elle est bien étrange cette canzone, dit Lucien l'âne en levant la tête de son tas de chardons.



Étrange, étrange, et en quoi donc ?, demande Marco Valdo M.I.



En quelques mots, elle plante un paysage historique et mondial. On part d'Auschwitz, où l'enfant flotte toujours dans les nuages et se demande encore où et quand le vent le posera. Comme tu le comprends, l'enfant ici est l'incarnation de tous les enfants du monde qu'on envoie dans les nuages. Et ils sont des millions... Car vois-tu, Marco Valdo M.I., la faim est aussi une arme de guerre... On passe par le Vietnam, l'Irak, l'Afghanistan, l'Afrique pour finir là devant nous, en Méditerranée, où les enfants et leurs parents finissent sous l'eau et pour les plus chanceux, dans un camp.



Mais, c'est l'histoire de notre monde, c'est l'histoire de notre temps. Sans compter les famines et les trafics en tous genres. Remarque qu'on termine au dix-neuvième siècle avec une tragédie océanique, que l'actualité a ramenée au large de la Sicile... Souviens-t-en, Théodore Géricault en fit un tableau (de sept mètres sur cinq) qui la rappelle avec insistance; il s'intitule Le Radeau de la Méduse et comme tu le sais certainement, le camp où l'on entasse les réfugiés-émigrés-immigrés-rescapés est situé sur l'île de Lampedusa en italien et Lampéduse, en français. Voilà pourquoi la canzone s'intitule Le Radeau de Lampéduse. Raconter la vie et les misères des hommes et dénoncer ceux qui en sont les coupables, tel est le sens du travail pictural, comme c'est celui des canzones. Il y aurait encore mille choses à dire, ainsi va la poésie qu'elle arrive en quelques mots à ouvrir tout grand la complexité du monde et à montrer son incommensurable indignité.



En somme, dit Lucien l'âne en insistant d'un battement de paupières, c'est toujours cette Guerre de Cent Mille Ans qui n'en finit pas d'aller de massacres en massacres pour assurer encore et encore la domination et la prospérité des riches avec la peau et sur le dos des pauvres. De ce monde aux conceptions surannées de profit et d'exploitation, ce monde libéral, qui n'en finit pas de pourrir l'existence des hommes.



Faisons comme les Canuts, mon ami l'âne Lucien, tissons-lui chaque jour son linceul... à ce monde absurde.





Ainsi Parlaient Marco Valdo M.I. et Lucien l'âne.



Après Auschwitz et les grands massacres

Certaines valeurs, certains simulacres

Hier encore, indiscutables

Comme d'impérissables

Civilisations écroulées

S'enfoncent dans le silence.

Il n'en reste que des souvenances

De poussière sale auréolées.

Et les faits répètent et empirent

Les plus grandes exterminations.

Les bombardiers de l'Empire

Au gigantesque rayon d'action

Les chasseurs en Irak ou en Afghanistan

Les famines et les guerres d'Afrique

Aux mots freedom et democracy souvent

Donnent d'irrésistibles effets émétiques

Et comme la poussière immaculée,

Déclenchent la blanche allergie.

Et pendant ce temps-là, en Méditerranée,

Des barques à ras bord remplies,

De toutes parts submergées,

Sans timon ni voile ni quille,

Avec des pleurs et des hurlements

Rejouent sempiternellement

Le Radeau de la Méduse

Sur un canot au large de Lampéduse.

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10 septembre 2009 4 10 /09 /septembre /2009 14:20

EN PRISON, EN PRISON



Version française - EN PRISON, EN PRISON – Marco Valdo M.I. – 2009

Chanson italienne – In prigione, in prigione – Eduardo Bennato – 1977



 

Regarde, Lucien mon ami, une chanson sur la prison. On veut y mettre tout le monde en prison. Curieuse idée...

Ce doit être, dit Lucien l'âne qui en connaît un bout sur l'humanité, une idée de juge. Une sorte de déformation professionnelle...

En effet, ça ressemble bien à ça. Un juge exalté, compulsif, délirant... Il y en a ... Surtout dans certains régimes, quand l'ambiance se durcit, que certains sont atteints du goût immodéré du pouvoir...

Oui, oui, je vois, dit Lucien l'âne en agitant la queue pour approuver d'un geste fort.


Mais la fin est assez proche de celle que réservait Georges Brassens à certain juge poursuivi par un gorille dans les buissons... Bien sûr, ici, le gros primate quadrumane est absent, mais le juge va subir le châtiment qu'il inflige à tous les gens. Il y a d'ailleurs là une sorte de justice immanente, dirait-on.

Ainsi Parlaient Marco Valdo M.I. et Lucien l'âne.

Toi qui es innocent

Toi qui n'as rien fait

Toi qui te lamentes

Car ils t'ont embrouillé

Alors écoute bien :



Tu iras en prison

En prison, en prison

Précisément toi, en prison

Et que cela te serve de leçon !



Toi qui as respecté

Les lois de l'État

Tu te sens malchanceux

Tu te sens persécuté, offensé

Tout triste, alors :



En prison, en prison !

En prison, en prison

En prison, en prison

Précisément toi, en prison

Et que cela te serve de leçon !



Toi qui as toujours calculé

Toi qui as toujours prévu

Toi qui ne t'es jamais égaré

Toi qui a toujours

Cru à la justice



Tu iras en prison

En prison, en prison

Précisément toi, en prison

Et que cela te serve de leçon !



Toi qui toujours enquêtes

Sur le compte des gens

Et ne t'arrêtes pas aux apparences

Mais analyses, creuses et puis

Craches tes sentences, alors :



Tu iras en prison

En prison, en prison

Précisément toi, en prison

Et que cela te serve de leçon !



Toi qui es avocat

Sérieux et préparé

Tu ris et tu plaisantes peu

Mais tu connais toutes les règles

Du jeu, alors :



Tu iras en prison

En prison, en prison

Précisément toi, en prison

Et que cela te serve de leçon !



Et tous les professeurs

Médecins et docteurs

Notables et avocats

Et tous les chefs

Des syndicats, tous !


Tous, tous en prison !

En prison, en prison

Précisément toi, en prison

Et que cela te serve de leçon !



Et ces honnêtes gens

Tous prêts à la fête

Qui s'en vont vers la mer

Vous devez les bloquer, les arrêter

Les capturer, oui


Pour les envoyer

En prison, en prison

Précisément toi, en prison

Et que cela te serve de leçon !



En prison, en prison

En prison, en prison !

En prison, en prison

Et pas d'explication !



Toi aussi en prison

En prison, en prison

Toi aussi en prison

Toi aussi en prison !



Non, laissez-moi !

C'est une erreur

Je suis le juge

Laissez-moi, c'est une erreur

Non, non, c'est une erreur ! ...



 

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7 septembre 2009 1 07 /09 /septembre /2009 12:20

Interrogatoire

 

Canzone léviane – Interrogatoire – Marco Valdo M.I. – 2009

Cycle du Cahier ligné – 49

 

 

Interrogatoire est la quarante-neuvième chanson du Cycle du Cahier ligné, constitué d'éléments tirés du Quaderno a Cancelli de Carlo Levi.

Tu sais, Lucien mon ami, comment ça va dans les guerres des hommes et même, dans les guerres qui n'osent pas dire leur nom, qui se cachent sous le nom de paix... C'est même l'état le plus constant de la guerre, c'est aussi l'état le plus sournois de la guerre de Cent Mille Ans que les riches mènent contre les pauvres. Le plus sournois puisqu'on fait croire qu'il n'y a pas la guerre, que parce que les armes n'entrent pas ouvertement en action pour tuer, conquérir, massacrer... les gens, il n'y aurait pas la guerre. Quelle blague ! Regarde bien, Lucien, seul un des deux camps détient les armes (toutes les armes, y compris des armes lourdes, des chars, des avions, des bombes et des armées professionnelles qu'il appelle police ou forces de l'ordre...) et impose ses façons et se dit légitime; c'est le camp des riches. Les riches tant qu'ils peuvent exploiter à leur aise, tant que les pauvres ne tentent pas de changer le monde, les riches n'ont aucune raison de faire parler les armes. La guerre est simplement silencieuse, elle se tient coite. Comprends-tu cela , Lucien ?

 

Je le comprends très bien et d'ailleurs, j'ai toujours connu ça, dit l'âne Lucien en soupirant avec conviction. Mais dans le passé, les armes étaient moins lourdes, moins perfectionnées... Les pauvres, les plébéiens pouvaient espérer mener à bien une insurrection. Et parfois même, ils ont réussi... Mais à présent, au moins dans les pays d' Europe, ils n'ont plus aucune chance; du moins, on veut leur faire croire. L'appareil du système est gigantesque et terriblement sophistiqué. La terreur est une donnée disons instituée, institutionnelle et elle se renforce chaque jour. Les gens sont de plus en plus contrôlés et par tous les moyens et même avec de beaux prétextes : économie, santé, sécurité...

 

Voilà, je vois que tu en sais autant que moi sur le sujet. Mais la canzone parle d'un interrogatoire. Ce sont des pratiques courantes sous nos latitudes et certains des « interrogés » n'en sortent pas vivants. Ce fut le cas de Giuseppe Pinelli et de bien d'autres. Les fascistes, les franquistes, les salazaristes et les nazis l'ont pratiqué avec une certaine vigueur; comme tu le vois, ils ont fait des émules de nos jours. Donc, notre prisonnier-guerrier-blessé a lui aussi subi un ou plusieurs interrogatoires et il le raconte ici. Le but de l'interrogatoire, outre de terroriser celui qu'on interroge et au-delà tous ceux qui le soutiennent, a comme fonction de soutirer certains renseignements ou certains aveux... Encore faut-il y arriver.

 

Je sais, je sais, dit Lucien l'âne en agitant la tête d'un air convaincu. D'ailleurs, ceux qui ont une tête d'âne savent souvent résister à pareilles épreuves.

 

Oui, Lucien, les ânes sont des animaux extraordinaires et jamais personne, même le Grand Inquisiteur, n'a pu faire parler un âne. Cependant, notre blessé-prisonnier-guerrier lui adopte une autre attitude. Il parle et il parle beaucoup, il dit énormément de choses, il raconte des histoires, il dit tout ce qu'on lui laisse dire, mais rien de ce qu'il sait qu'ils veulent savoir. C'était la méthode de Carlo Levi... Lequel durant le Ventennio a subi une série d'interrogatoires au fil de ses emprisonnements. On en a même retrouvé les traces dans les archives de la police fasciste, la sinistre Ovra. Par parenthèse, on a même retrouvé le nom de celui qui l'avait dénoncé – un lointain cousin, un écrivain de gare, le dénommé Pitigrilli, lequel se convertit sur le tard, dans les bras de Padre Pio. Comme quoi, la délation mène à tout, même sur le chemin ciel.

 

Ainsi Parlait Marco Valdo M.I.

 

 

 

J'écoute la pluie qui martèle le toit

Je ne vois rien, je ne bouge pas.

Des d'hommes se pressent autour de moi

Je ne dois pas dire certaine chose, ne rien révéler.

Pourtant, il me faut parler

Et je n'y arrive pas.

Les mots ne parviennent pas à sortir.

Ce n'est pourtant pas comme dans le Spitfire,

Où chaque son était couvert par le fracas du moteur.

Il y a, à l'entour, un silence sidéral.

Qui m'englue d'une vilaine peur.

Mon effroi est viscéral.

Les mots deviennent indicibles

Je reste sans voix soudain

Pris dans une trame invisible,

Ou quelque chose d'encore plus fin

De plus minutieux, comme un voile.

Je suis coincé dans la toile

D'une araignée

Patiente et obstinée.

J'essaye de chanter, de sourire.

Ni moi, ni aucun autre ne devrait trahir.

Pour mes interlocuteurs curieux,

Ce que je sais est infiniment précieux

Et à toutes forces, il me faut le taire.

Il me faut à cette police

Dire le rien avec des mots de gel et de terre,

Dire ainsi le silence face aux murs de silice.

Et je parle, je discours

Tant et plus, autour et alentour,

Tissant de mes mots enchantés

La toile infinie de l'inanité.

 

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7 septembre 2009 1 07 /09 /septembre /2009 12:18

DISAMISTADE

 

 

Version française – DISAMISTADE – Marco Valdo M.I. – 2009

Chanson italienne – Disamistade – Fabrizio De André – 1996

 

Ohlala, dit Lucien l'âne tout étonné en ouvrant des yeux plus noirs que le trou de l'univers, mais il y a déjà une traduction en français sur le site des CCG et en plus, c'est Riccardo Venturi qui l'avait faite...

 

Oui, je sais cela, Lucien mon ami, mais je n'ai pas pu m'empêcher de faire ma version... D'autant plus, souviens-toi, que j'avais abordé le sujet dans Orgosolo, Core meu, frate meu et que j'ai écrit deux ou trois autres chansons sur la Sardaigne. Et puis, j'aime beaucoup De André. Et même, rappelle-toi, mes premières traductions étaient des chansons de De André à la demande expresse de jeunes personnes sardes. J'avais même comme une intention de faire une intégrale française des chansons de De André en italien.

 

Oui, mais quand même...

 

Quand même... Exactement Lucien, je le fais quand même... Note bien aussi que Riccardo Venturi dans le commentaire à sa traduction en français disait : « La traduction de cette chanson dans n'importe quelle langue pose de nombreux problèmes... » En quelque sorte, une incitation à traduire... Ce que j'ai fait. Bien m'en a pris, nous avons deux versions fort différentes... Ce qui ouvre la porte à d'autres versions françaises encore... sans compter celles en d'autres langues.

 

Personnellement, dit Lucien l'âne au profil poétique, j'adore ça et je me réjouis beaucoup à l'idée de nombreuses traductions d'un même texte de chanson... La poésie est très souple et en quelque sorte, elle est une irisation du monde. Elle se complaît dans l'amphibologie et dans l'équivocité. Elle seule peut s'accorder sans sourciller d'une tour de Babel digne de Pieter Breughel l'ancien. J'aurais même tendance à penser que la poésie elle-même est la tour de Babel que le Dieu-Patron a voulu abattre et contre laquelle il a lancé la diversité des langues, croyant ainsi détruire la Poésie, mais cette dernière s'est multipliée au fil des langues nouvelles et dans chaque langue, elle versifie et elle se diversifie encore. Grâce à cette malédiction patronale, il y eut Cervantès, Sterne, Montaigne, Rimbaud... Il y eût des millions de livres et plus seulement, le Livre. On l'a échappé belle. Imagine le monde avec un seul livre... Ainsi naquit l'humanité future... On pourrait même penser, dit l'âne Lucien en un éclair de lucidité, que ce fut la première des disamistades...

Ceci expliquerait peut-être pourquoi les poètes ont toujours si souvent été maudits, déconsidérés, malvenus, sulfureux... toutes raisons pour lesquelles je les apprécie hautement.

 

Ainsi parlaient Marco Valdo M.I. et Lucien l'âne

 

 

Que font ces personnes

Devant l'église

Ces gens divisés

Cette histoire en suspens

À une mesure de bras

À l'écart de l'offense

Car on pense à la paix

Quand la paix s'effleure.

Deux familles désarmées de sang

Se rangent et se rendent

Et pour tous, la douleur des autres

Est moitié de douleur.

 

Elle se contente de causes légères

La guerre du cœur

Le lamento d'un chien abattu

Par une ombre de passage.


Elle se satisfait de brèves agonies

Sur le chemin de la maison

Une explosion de sang

Une absence composée pour repas.


Et à chaque foutu coup de feu alentour

On invoque la chance.

 

Que font-elles là ces filles

À broder et à coudre

Ces taches de deuil

Qui ont renoncé à l'amour.

Parmi elles, se cache

Une espérance déçue

Que l'ennemi convoite

Qu'il veut récupérer.

Et un frôlement de mains surprises

À toucher d'autres mains

Il doit y avoir une manière de vivre

Sans douleur.

 

Une course d'yeux dans les yeux

Pour découvrir qu'au contraire

C'est seulement un repos du vent

Une moitié de haine.

Et à la partie qui manque

Se consacre l'autorité.

Car la disamistade

S'oppose à notre mésaventure

Cette course du temps

Où se dépareillent destins et fortune.

Que font ces personnes

Devant l'église

Ces gens divisés

Cette histoire en suspens

 

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Published by Marco Valdo M.I. - dans Fabrizio De André
3 septembre 2009 4 03 /09 /septembre /2009 22:05

L'Apathétique

 

Canzone léviane – L'Apathétique – Marco Valdo M.I. – 2009

Cycle du Cahier ligné – 48

 

 

L'Apathétique est la quarante-huitième chanson du Cycle du Cahier ligné, constitué d'éléments tirés du Quaderno a Cancelli de Carlo Levi.



Cette fois, Lucien mon ami l'âne aux sabots luisants comme la pierre philosophale, notre prisonnier-blessé-guerrier plonge au cœur de son monde clos. Quand va-t-il en sortir ? Comment va-t-il en sortir ? Il passe au plus profond de l'angoisse, d'une sorte de moment désespéré. « Je suis dans l'obscurité,/Aveugle comme un prématuré » avec un temps incalculable, avant la sortie... C'est un peu pour ça que la canzone porte ce titre beethovenien ou tchaikowskien, au moins par l'assonance. De toute façon, deux grands tragiques.





C'est assez inquiétant une pareille situation, dit Lucien l'âne, et je comprends très bien qu'il soit tellement bouleversé. On dirait qu'on est au centre de son cerveau en train de subir une tempête de pensées. Ce doit être très difficile à vivre. Cela dit, méfie-toi de l'alpha privatif, serait que ce rêve finit dans l'apathie.





C'est cela, tu as exactement diagnostiqué le malaise. Mais dans le rêve, dans le flux onirique, il y a tout et son contraire. Le rêve et le cauchemar. Mais il y a plus... Et c'est plus, comment dire, inquiétant ou plus étonnant... Enfin, moi, ça me secoue un peu et c'est le fait que je ressente aussi « son » malaise, qu'il entre dans mes pensées, qu'il y fait sa place. Comment te dire ? D'habitude, quand j'écris un texte, une canzone, une poésie... quelque chose comme ça, j'écris et le texte se développe devant moi... Ici, j'ai comme l'impression qu'il se développe en même temps en moi. Que ce « tempo éperdu... » vient dans ma vie, entre dans mon monde. Quand il dit « entre les envies et les nausées », j'ai comme l'impression de les ressentir.





Ohlala, dit Lucien l'âne en secouant ses oreilles, tu es bien sensible... Mais quand même, je dois bien t'avouer que moi aussi, je ressens très fort cette proximité du guerrier-blessé-prisonnier... Je me demande bien si d'autres vont ressentir de tels sentiments....





Ainsi Parlait Marco Valdo M.I.





Pour l'oiseau, son vol chantourné

Est un langage différent de la vision;

Comme une langue sans conjugaison

Qu'on utilise avec les étrangers,

Une espèce de film au ralenti, continué jusqu'à l'obsession;

Ou un après-midi de soleil dans les prés

Quand tout pousse à l'élan, à la course, au bond,

Et qu'au contraire, on est contraint

À la bride, à la retenue, au frein.

Je suis dans l'obscurité

Aveugle comme un prématuré,

Qui sans même imaginer son futur,

Attend que ses sens maturent.

La naissance est une fatalité

Une expulsion de l'être

Une chose d'une urgente beauté.

Où suis-je avant de renaître ?

On navigue ainsi dans l'inconnu

Entre les envies et les nausées

Selon un tempo éperdu

Que ne mesurent ni les années

Ni les montres, ni les horloges, ni les clepsydres d'antan

Quel est donc mon temps ?

Il se fait d'infinis présents

Comme un songe du matin

qu'un réveil décolore et déteint

Et qu'on voudrait prendre en main,

Une vision incohérente, un songe qui se dissout.

Il me faut encore écrire avec les yeux clos,

Les histoires d'un monde enclos,

Et qui craque et qui crève de partout.

Il est vain pourtant d'écrire au lit,

Quand le sommeil nous envahit

Et que le crayon tombe de la main

En d'hermétiques gribouillis.

On ne sait ce que sera demain

En ce monde malade d'un mal commun.

La grappe se reforme et se déplace:

Chaque jour, un ancien grain retrouve sa place.

Ils reviennent tous, ils renaissent un à un :

Les disparus, les éternels besogneux,

Les pourris, les secs et les juteux,

Ceux qui pour toi étaient morts

Comme demain, tu seras mort.

Tout ce monde que tu avais oublié

D'un pas lourd et lent, revenait dans l'obscurité.

L'éclipse est un signe dans le désert

L'annonce d'un grand bouleversement

Après le frisson et le souffle du vent,

Avec la venue du rose et du vert.

En l'esprit lacunaire et vaguant,

Le rêve dit une histoire,

Et laisse une trace dans la mémoire.

 

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Published by Marco Valdo M.I. - dans Marco Valdo M.I.

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