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3 septembre 2009 4 03 /09 /septembre /2009 22:05

L'Apathétique

 

Canzone léviane – L'Apathétique – Marco Valdo M.I. – 2009

Cycle du Cahier ligné – 48

 

 

L'Apathétique est la quarante-huitième chanson du Cycle du Cahier ligné, constitué d'éléments tirés du Quaderno a Cancelli de Carlo Levi.



Cette fois, Lucien mon ami l'âne aux sabots luisants comme la pierre philosophale, notre prisonnier-blessé-guerrier plonge au cœur de son monde clos. Quand va-t-il en sortir ? Comment va-t-il en sortir ? Il passe au plus profond de l'angoisse, d'une sorte de moment désespéré. « Je suis dans l'obscurité,/Aveugle comme un prématuré » avec un temps incalculable, avant la sortie... C'est un peu pour ça que la canzone porte ce titre beethovenien ou tchaikowskien, au moins par l'assonance. De toute façon, deux grands tragiques.





C'est assez inquiétant une pareille situation, dit Lucien l'âne, et je comprends très bien qu'il soit tellement bouleversé. On dirait qu'on est au centre de son cerveau en train de subir une tempête de pensées. Ce doit être très difficile à vivre. Cela dit, méfie-toi de l'alpha privatif, serait que ce rêve finit dans l'apathie.





C'est cela, tu as exactement diagnostiqué le malaise. Mais dans le rêve, dans le flux onirique, il y a tout et son contraire. Le rêve et le cauchemar. Mais il y a plus... Et c'est plus, comment dire, inquiétant ou plus étonnant... Enfin, moi, ça me secoue un peu et c'est le fait que je ressente aussi « son » malaise, qu'il entre dans mes pensées, qu'il y fait sa place. Comment te dire ? D'habitude, quand j'écris un texte, une canzone, une poésie... quelque chose comme ça, j'écris et le texte se développe devant moi... Ici, j'ai comme l'impression qu'il se développe en même temps en moi. Que ce « tempo éperdu... » vient dans ma vie, entre dans mon monde. Quand il dit « entre les envies et les nausées », j'ai comme l'impression de les ressentir.





Ohlala, dit Lucien l'âne en secouant ses oreilles, tu es bien sensible... Mais quand même, je dois bien t'avouer que moi aussi, je ressens très fort cette proximité du guerrier-blessé-prisonnier... Je me demande bien si d'autres vont ressentir de tels sentiments....





Ainsi Parlait Marco Valdo M.I.





Pour l'oiseau, son vol chantourné

Est un langage différent de la vision;

Comme une langue sans conjugaison

Qu'on utilise avec les étrangers,

Une espèce de film au ralenti, continué jusqu'à l'obsession;

Ou un après-midi de soleil dans les prés

Quand tout pousse à l'élan, à la course, au bond,

Et qu'au contraire, on est contraint

À la bride, à la retenue, au frein.

Je suis dans l'obscurité

Aveugle comme un prématuré,

Qui sans même imaginer son futur,

Attend que ses sens maturent.

La naissance est une fatalité

Une expulsion de l'être

Une chose d'une urgente beauté.

Où suis-je avant de renaître ?

On navigue ainsi dans l'inconnu

Entre les envies et les nausées

Selon un tempo éperdu

Que ne mesurent ni les années

Ni les montres, ni les horloges, ni les clepsydres d'antan

Quel est donc mon temps ?

Il se fait d'infinis présents

Comme un songe du matin

qu'un réveil décolore et déteint

Et qu'on voudrait prendre en main,

Une vision incohérente, un songe qui se dissout.

Il me faut encore écrire avec les yeux clos,

Les histoires d'un monde enclos,

Et qui craque et qui crève de partout.

Il est vain pourtant d'écrire au lit,

Quand le sommeil nous envahit

Et que le crayon tombe de la main

En d'hermétiques gribouillis.

On ne sait ce que sera demain

En ce monde malade d'un mal commun.

La grappe se reforme et se déplace:

Chaque jour, un ancien grain retrouve sa place.

Ils reviennent tous, ils renaissent un à un :

Les disparus, les éternels besogneux,

Les pourris, les secs et les juteux,

Ceux qui pour toi étaient morts

Comme demain, tu seras mort.

Tout ce monde que tu avais oublié

D'un pas lourd et lent, revenait dans l'obscurité.

L'éclipse est un signe dans le désert

L'annonce d'un grand bouleversement

Après le frisson et le souffle du vent,

Avec la venue du rose et du vert.

En l'esprit lacunaire et vaguant,

Le rêve dit une histoire,

Et laisse une trace dans la mémoire.

 

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Published by Marco Valdo M.I. - dans Marco Valdo M.I.

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