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23 décembre 2011 5 23 /12 /décembre /2011 22:24
MÉLODIE ROUGE



Version française – MÉLODIE ROUGE – Marco Valdo M.I. – 2011

Chanson allemande – Rote Melodie – Kurt Tucholsky – 1922

Première interprète : Rosa Valetti

Musique de Friedrich Hollander

 

 

Rosa Valetti était une actrice de cinéma et de cabaret et une chanteuse. Fondatrice du célèbre « Cabaret Grössenwahn » (Grands délires ?) au café de l'Ouest à Berlin ; elle fut l'interprète de la première mise en scène de L'Opéra de Quatre Sous de Bertolt Brecht et elle tînt un rôle important dans plusieurs films fameux de cette époque, de « L'ANGE BLEU » à « M, LE MAUDIT ». Kurt Tucholsky écrivit spécialement pour elle cette « MÉLODIE ROUGE » que Valetti présentait souvent dans ses performances théâtrales.

 

Kurt Tucholsky, l'auteur du texte de cette chanson, était un écrivain, poète, journaliste et un des plus importants auteurs satiriques allemands. Né en 1890 dans une famille juive d'origine polonaise, Tucholsky dès sa jeunesse composa des textes satiriques régulièrement publiés sur d'importants hebdomadaires, quotidiens et dans les revues d'art. En 1915, il fut appelé sous les armes et survécut à trois années de guerre, qui le marquèrent profondément. Rentré à Berlin, il devînt le directeur de « Ulk », le supplément hebdomadaire du Berliner Tageblatt, et il se lança dans une série de féroces pamphlets contre la guerre et contre les militaristes. Au début des années 20, il se transféra à Paris, où il s'enticha du cabaret et où il put finalement respirer un air de liberté qui lui manquait sur sa sinistre terre. La fin de l'expérience démocratique de la République de Weimar et la montée des droites poussèrent Tucholsky à des positions toujours plus radicales, pacifistes et de totale aversion envers l'autoritarisme et le militarisme. En 1924, dans les colonnes de la revue que par la suite, il dirigea "Die Weltbühne" ("Le Théâtre du Monde"), il fit connaître son personnage littéraire le plus fameux, le bourgeois juif hypocrite et arrogant « Monsieur Wendriner », protagoniste de nombre de ses récits.

En 1929, Tucholsky publia son œuvre al plus importante : « Deutschland, Deutschland über alles », accompagnée de terribles montages photographiques satiriques de l'artiste dadaïste, Helmut Herzfeld, qui avait anglicisé son nom en John Heartfield en signe de protestation conter la campagne patriotique anti-britannique de la droite. « Deutschland, Deutschland über alles » est une impitoyable critique de l'Allemagne, de sa société, du rôle de l'armée, de la corruption de la justice, qui vaudra à Tucholsky une condamnation à mort virtuelle : un groupe de chemises brunes appartenant aux SA (Sturmabteilungen), dirigées par Ernst Röhm, leader national-socialiste, chercheront à le tuer tandis qu'il se trouvait à Wiesbaden pour un cycle de conférences.

 

 

Tucholsky décida à ce moment de s'exiler en Suède où, en 1933, il fut rejoint par le retrait de sa nationalité allemande, juste au moment où les nazis sur la place de l'Opéra à Berlin brûlaient les livres interdits, y compris les siens. De la Suède, il fut contraint d'assister impuissant à la victoire du nazisme et à la persécution de la Weltbühne et de son nouveau directeur, son ami Carl von Ossietzky.

 

Le soir du 21 décembre 1935, Kurt Tucholsky mourut à l'hôpital de Göteborg d'une overdose de somnifères, selon toute probabilité un suicide ou une tentative de trouver d'endormir pour quelque heures son désespoir.

 

(Juste un mot à propos de Kurt Tucholsky... Pour dire qu'il connut des moments de sa vie, où tout en menant ce combat, il pouvait trouver des moments de paix et pourquoi pas, de réel plaisir...Voir à ce sujet la chanson Mademoiselle Ilse [[http://www.antiwarsongs.org/canzone.php?id=37875&lang=it]]... On y découvre un autre Tucholsky...)[Lucien Lane]

 

« Mélodie Rouge » est une chanson dédicacée spécialement par Tucholsky au général Erich Ludendorff, un des plus grands bouchers de la première guerre mondiale et par la suite, un grand ennemi de la démocratie parlementaire et de la République. Durant les années de Weimar, Ludendorff devînt le point de référence de tous les nationalistes, militaristes et revanchards allemands et peut être considéré à bon droit comme un des instigateurs du nazisme.

 

Dans cette chanson – dont ne connaissant pas bien l'allemand (« excusez-moi, pardon, comme chantait Paolo Conte), j'ai réussi à comprendre seulement le sens, en m'aidant d'une horrible traduction automatique et de recherches sur des sites en langue anglaise – Tucholsky reprend un des thèmes des anciennes ballades magico-naturelles, celui du retour des morts en une cavalcade vengeresse, pour raconter une mère qui, ayant perdu à la guerre son unique fils, s'adresse au général Ludendorff et, en le maudissant, lui lance une sorte d'enchantement : tous les soldats morts à la guerre et les militants démocratiques assassinés sortent de leurs tombes et marchent compacts, comme un seul bataillon, contre le responsable de leur mort, le perfide général pré-nazi.

 

 

 

Pour Erich Ludendorff

 

La femme chante :

 

Je suis seule

Ça ne peut être

Mon fils se trouve chez les Russes.

Là-bas, on les a envoyés

Comme du brave bétail,

Au front – en omnibus.

Et là – là s'arrêta le voyage.

Hého ! Il git dans la crasse.

Les ans, les ans

Passent lents et mutiques.

Les cheveux, les cheveux

Ont le gris de la Baltique.

Général ! Général !

Ne tente pas cela encore une fois !

Les morts crient !

Pense aux rouges !

Garde-toi ! Garde-toi !

Écoute la rumeur diffuse du chœur !

Nous approchons tout près – Homme des canons !

De la tombe ! Fous le camp !

 

 

Je vis au travers du pays

Dans le monde en feu

Des milliers de femmes pleurer.

La Camarde fauchait.

Elles souffraient au milieu

Au milieu de cent mille horreurs.

Et pourquoi, cette angoisse de la mort et cette frayeur?

Hého ! Pour une saleté !

Les corps ! Les corps !

Gisent dans la terre.

Nous les femmes ! Nous les femmes !

Nous ne valons maintenant plus rien !

Général ! Général !

Ne tente pas cela encore une fois !

Les morts crient !

Pense aux rouges !

Garde-toi ! Garde-toi !

Écoute la rumeur diffuse du chœur !

Nous approchons tout près – Homme des canons !

À la tombe ! Fous le camp !

 

 

Dans la nuit obscure,

Quand personne ne veille

Alors sortent des tranchées

Le fusilier

Le mousquetaire,

Qui ne connaissent pas la paix.

Le bataillon des morts s'élève

Hého ! Vers celui qui vit.

Vaguement, vaguement

Tu entends dans le bruit du vent

Ils arrivent ! Ils arrivent !

Et ils envahissent ta maison...

Général ! Général !

Ne tente pas cela encore une fois !

Les morts crient !

Pense aux rouges !

Garde-toi ! Garde-toi !

Écoute le chœur souterrain !

Nous approchons tout près – toi, Homme d'os !

Au pas !

Suis nous !

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Published by Marco Valdo M.I.

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