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25 juin 2013 2 25 /06 /juin /2013 23:07

CYRANO



Version française – Cyrano – Marco Valdo M.I. – 2013

Chanson italienne – Cirano – Francesco Guccini – 2005

http://www.youtube.com/watch?v=LPqLpEyW0KU

 

 

 

 

Coquelin_aine.jpg

 

 

 

 

Ah, Lucien l'âne mon ami, laisse-moi te conter la curieuse aventure de ce Cyrano que je viens de terminer à l'instant... D'autant plus curieuse que j'attends demain, chez moi, ici, la venue de Roxane... Celle qui s'occupe si bien des hommes, des chevaux et des ânes.

 

 

Que me racontes-tu encore, Marco Valdo M.I., mon ami ? D'abord, je te prie de saluer Roxane de ma part quand elle viendra. Et puis, dis-moi donc cette curieuse aventure...

 

 

Eh bien, voilà... J'ai été interpellé ce matin-même par une personne, une dame ou une demoiselle, que sais-je, je ne l'ai jamais vue... qui m'écrivait via le Réseau et me disait, je la cite : « N'ayant pas ou peu l'occasion de pratiquer l'italien, j'ai été ravie de trouver enfin des traductions de textes notamment de Guccini qui aient de la tenue et qui soient au plus près de l'esprit de ce cantautore génial et des autres.

Puis-je me permettre de vous demander si vous avez l'intention de traduire sa chanson "Cirano'; qui, me semble-t-il pourrait figurer dans votre blog? ». Comme tu le vois, c'était une nette invitation à traduire le Cirano de Francesco Guccini, chanson que je ne connaissais pas. Laquelle chanson ne figure pas dans les CCG, ni sur mon blog Canzones et il n'en existe pas de traduction française... Je me suis donc attelé à la tâche et voici le résultat... Cependant, l'aventure n'est pas curieuse qu'en cela. Elle l'est bien plus encore s'agissant de Cyrano et c'est ce que je m'en vais te conter plus avant.

 

 

Je suis tout ouie, bref, je t'écoute. Je me demande bien ce que tu vas me conter ? dit l'âne Lucien en levant les oreilles vers le sommet de l'éternité. (Précisons cependant qu'il a levé une oreille après l'autre et que toutes deux sont à présent alignées dans une parfaite verticale, si on veut bien supposer que le sommet de l'éternité est à l'exact extrémité d'une verticale qui partirait de l'axe médian entre les oreilles de l'âne Lucien.) Je suppose que tu ne vas quand même pas remonter à la vieille lune...

 

 

Je crains fort de te décevoir, Lucien l'âne mon ami, car le point de départ de la chanson de Guccini « Cirano » est précisément un voyage dans la Lune. Tout a commencé avec le « vrai » Cyrano de Bergerac (1650) et très exactement : Hercule Savinien Cyrano de Bergerac, certes un bretteur émérite, mais aussi et surtout, c'est ce qu'on en a le plus retenu, un excellent écrivain auteur précisément d'un voyage dans la Lune sous le titre, qui est lui-même tout un programme : « L'Histoire comique des États et Empires de la Lune ». Ce roman de science-fiction avant la lettre, est une chose littéraire dont le lointain ancêtre était un écrit intitulé : « Histoire Véritable », qui raconte aussi un voyage dans la Lune et dont l'auteur n'était autre que Lucien de Samosathe (+/- 150)... Par parenthèse, outre de s'inspirer de Lucien, auquel je te rappelle que tu es inextricablement lié et dont je suis sûr que tu le connais mieux que moi, ce Cyrano a mené sa vie durant un combat dans le droit fil de Lucrèce et d'Épicure, pourfendant ainsi l'Infâme (à savoir l' Écar – Église catholique, apostolique et romaine), par l'écrit. Ceci est un premier étage de la fusée Cyrano, car en plus d'avoir été un des premiers auteurs de science-fiction, un philosophe matérialiste et atomiste, prédécesseur des Lumières et un écrivain politique, il fut un anticlérical déclaré en un temps où la chose était nettement périlleuse. Certains ont fini sur le bûcher ou assassinés pour moins que ça. Le fait qu'il fut aussi homosexuel n'arrangeait évidemment rien, la chose étant alors autant qu'aujourd'hui, condamnée par l'Église – plus puissante encore à l'époque. Une dernière chose, c'était en effet un homme de grand courage et un fin escrimeur qui un jour ou un soir, près de la porte de Nesle pour défendre le poète François Pajot de Lignières affronta victorieusement une centaine de spadassins ; Cyrano était bien Cyrano. Le deuxième étage fut le fait d'Edmond Rostand qui a écrit vers 1900 une pièce de théâtre intitulée « Cyrano de Bergerac », en mémoire de l'écrivain et de son énorme nez. C'était le grand retour de Cyrano sur le devant de la Seine et sa mise en gloire aux côtés de Don Quichotte, du Capitaine Fracasse, des Trois Mousquetaires, d'Edmond Dantès... Il entrait pour la deuxième fois de plain pied dans la littérature mondiale.

 

 

D’accord, mais la chanson de Guccini, que devient-elle ?, dit Lucien l'âne en raclant le sol d'un sabot rageur... J'aimerais quand même savoir...

 

 

J'y viens, Lucien l'âne mon ami. C'est le troisième étage de mon histoire. Cent ans se sont encore passés quand Guccini bâtit sa chanson sur l'étage de Rostand. Et tout spécialement sur la scène IV de l'acte I, dont je te rappelle in extenso le célébrissime envoi du poème tissé dans l'instant par le poète Cyrano, renvoyant instantanément l'auditeur à Villon ou à Rutebeuf : « 

 

Envoi

 

Prince, demande à Dieu pardon!

Je quarte du pied, j'escarmouche,

Je coupe, je feinte...

 

(Se fendant.)

 

Hé! Là donc!

 

(Le vicomte chancelle, Cyrano salue.)

 

A la fin de l'envoi, je touche. »

 

 

Oui, oui, dit Lucien l'âne manifestement perplexe tant il tord sa queue en point d'interrogation... Mais enfin, je ne m'explique pas ce que Guccini veut faire d'une chanson sur Cyrano...

 

 

Eh bien, ici, ce sont mes supputations. D'abord, il faut se dire que Guccini se prend, le temps de la chanson en tous cas, pour Cyrano. On a donc « Cirano-Guccini » qui s'en prend à une bande de gens pour défendre la belle Roxane, qui si je ne m'abuse, serait bien l'Italie elle-même ou la population italienne du moins celle qui dans la Guerre de Cent Mille Ans que les riches font aux pauvres, serait dans le camp des pauvres. En somme, c'est une attaque en règle contre cette Italie des « larges ententes », cette Italie qui n'en finit pas d'écraser ses petites et ses grandes gens, cette Italie de la médiocrité institutionnalisée... Mais soyons de bonne foi, cette Italie-là s'étend bien au-delà des frontières de la péninsule... Elle s'étend à l'Europe entière et bien au-delà encore... C'est cette bande, celle qui tient les entreprises, les capitaux et les États, en somme, qui tient le pouvoir, cette bande qui s'en prend aux Grecs et qui justifie ton « REGARDEZ CE QU'ILS FONT AUX GRECS, ILS VOUS LE FERONT DEMAIN »... J'arrête là, car il y aurait encore mille choses à dire...

 

Oui, évidemment, vue comme ça, la chanson de Guccini, de Cirano-Guccini a tout-à-fait sa place ici... Et je nomme par le même geste Guccini et Cyrano, canuts et tisserands du linceul de ce vieux monde servile, crasseux, ignorant, clinquant, arriviste et cacochyme.

 

 

 

Heureusement !

 

 

Ainsi Parlaient Marco Valdo M.I. et Lucien Lane

 

 

 

 

Avancez-vous donc, nez courts et charnus,

Jolis messieurs, je ne vous supporte plus ,

Je défie de ma plume vos egos orgueilleux

Avec cette épée, je vous tue quand je veux.

Venez vous-aussi poètes calamiteux,

Chanteurs inutiles des jours malheureux,

Bouffons qui vivez de vers rébarbatifs

Vous avez sous et gloire, mais vous n'avez pas de pif ;

Profitez de vos succès, jouissez de vos bonheurs,

Car le public est dressé et vous n'en avez pas peur

Allez on ne sait-z-où pour échapper aux taxes

Avec ce rictus servile et votre ignorance crasse.

 

Je suis seulement un pauvre cadet de Gascogne,

Et je ne supporte pas les gens qui ne rêvent pas.

Le clinquant ? L'arrivisme ? À l'hameçon, je ne mords pas

Je ne pardonne pas et à la fin de l'envoi, je touche,

Je ne pardonne pas, à la fin de l'envoi, je touche !

 

Allons avancez tous et finissons-en,

Nouveaux protagonistes, politiciens rampants,

Venez porte-mallette, ruffians et imbéciles,

Féroces présentateurs d'émissions débiles

Qui avez fait du n'importe quoi un art

Courage libéraux, abattez vos cartes

Il y aura toujours du crédit

En cet absurde beau pays bénit.

 

Ça ne fait rien si je me suis trompé, moi aussi

Déplaire est mon plaisir, j'aime être haï ;

Des rusés et des puissants depuis toujours je me ris

Je ne pardonne pas et à la fin de l'envoi, je touche,

Je ne pardonne pas, à la fin de l'envoi, je touche !

 

Mais quand je suis seul avec ce nez d'un pied

Qui d'une demi-heure toujours m'a précédé

Ma rage s'éteint et je me souviens interdit

Que rêver d'amour ne m'est pas permis

Les femmes, je ne sais combien j'en ai aimées, combien j'en ai croisées,

Était-ce ma faute ou le destin, toutes s'en sont allées

Alors quand la solitude me pèse et m'affole

Je me cloître chez moi, j'écris et en écrivant, je me console,

 

Je sens au dedans de moi que le grand amour existe,

J'aime sans péché, j'aime, mais je suis triste

Car Roxane est belle ; c'est le printemps, moi l'hiver,

Je n'ose pas lui parler : je lui dirai en vers, en vers, en vers…

 

Venez gens vides, finissons-en ici,

Et vous, prêtres qui vendez à tous une autre vie ;

Si comme vous le dites, il y a un Dieu dans l'infini,

Regardez dans votre cœur, vous l'avez déjà trahi

Et vous matérialistes, avec votre idée fixe,

Que Dieu est mort et l'homme seul en cet abîme,

Comme les cochons, vous cherchez les vérités à terre,

Gardez vos glands, laissez-moi mes ailes ;

 

Nains, rentrez chez vous, fichez-moi le camp,

Pour ma rage énorme, il me faut des géants.

Face aux dogmes et aux préjugés, jamais je ne me couche

Je ne pardonne pas et à la fin de l'envoi, je touche,

Je ne pardonne pas, à la fin de l'envoi, je touche !

 

Avec le nez et avec l'épée, je touche mes ennemis

Mais aujourd'hui dans cette vie, je ne trouve plus mon chemin.

Je ne veux pas me résigner à ce vilain destin,

Seule tu peux me sauver, toi seule et je te l'écris :

Il doit y avoir, je le sens, sur terre ou au ciel une place

Où nous ne souffrirons pas et où tout sera juste.

Il ne faut pas rire, je te prie, de mes paroles,

Toi, Roxane, tu es le soleil, moi, je suis une ombre

 

Je le sais, toi, tu ne ris pas, très douce dame

Et moi, je ne me cache pas sous ta fenêtre

Désormais je le sens, je n'ai pas souffert de trop,

Si tu m'aimes comme je suis et je serai pour toujours ton,

Pour toujours ton, pour toujours ton

Cyrano 

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Published by Marco Valdo M.I. - dans Francesco Guccini

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