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24 août 2012 5 24 /08 /août /2012 21:04

LE PRESSENTIMENT



Version française – LE PRESSENTIMENT – Marco Valdo M.I. – 2012

Chanson allemande - Die Ahnung - Erich Mühsam – 1909

 

Texte d'Erich Mühsam
Musique pour mezza voce e pianoforteécrite en 2010 par Gary Bachlund, chanteur lyrique et compositeur qui vit entre Los Angeles et Berlin.

 

 


Le pressentiment effroyable du Mal qui se rapproche... Qui sait si Erich Mühsam ne se rappela pas ce bref poème écrit 25 ans auparavant quand, à l'aube du 28 février 1933, les nazis et pas le facteur, appuyèrent sur la sonnette de son domicile, ou plus probablement, en défoncèrent la porte, en montrant à ce « juif subversif » un mandat d'arrêt signé de la main de Joseph Goebbels.

Non, ses sensations ne l'avaient pas trompé, mais il n'avait pas pu fuir à temps. Mühsam comme beaucoup d'autres finit englouti par le trou noir concentrationnaire que les nazis faisaient déjà fonctionner à plein régime.

 

 

 

 

Je sais, je sais, Lucien l’âne mon ami, je sais le reproche que l'on peut faire à ma version de ce poème chanté de Mühsam. Je sais bien qu'en allemand, il est écrit à l'imparfait ou au passé, comme tu voudras. Et que moi, je l'ai mis au présent. Mais c'est bien là une version... La version est une sorte de traduction-adaptation, une recréation dans une autre langue et ici, une autre époque d'un texte. De toute façon, ces choses-là se passent toujours au présent. La sensation, le sentiment, le pressentiment surgissent à l'instant où on les ressent. Après, quand ils sombrent dans le passé, ils deviennent des souvenirs.

 

 

Certes, j'imagine bien que ce soit là la seule solution raisonnable. Enfin, dis-moi quand même pourquoi tu as choisi de faire comme cela.


 

 

C'est fort simple, Lucien l'âne mon ami. Outre ce que j'ai dit , il y a le fait qu'en le mettant au présent ce poème prend une autre force et ramène très en avant la prémonition. Car ne t'y trompe pas, ce n'est pas là un texte sur l'absence d'inquiétude... Il n'y a quasiment que ce mot-là dedans. C'est un texte qui dit et redit l'inquiétude, le pressentiment de ce qui adviendra... ou de ce qui pourrait advenir. D'une part, cette inquiétude était la norme chez tout militant libertaire tant du temps du Kaiser que de ceux qui lui succéderont. Ces temps-là étaient durs. Certains étaient plus visés que d'autres, me diras-tu ? Oui, dans un premier temps, mais tout le monde est susceptible de pareille intrusion matinale... Rappelle-toi : Als die Nazis die Kommunisten holten [[4472]].


 

 

Mais figure-toi que c'est encore le cas à présent. Et qui sait ce qui se passera demain ? Oh, tout a l'air calme... Tout a l'air de se passer dans une sorte d’ouate feutrée... Mais qu'on ne s'y trompe pas, tout pourrait bien basculer demain. REGARDEZ CE QU'ILS FONT AUX GRECS, ILS VOUS LE FERONT DEMAIN. Rappelle-toi : Quand ils sont venus rançonner les Grecs [[40397]]


 

 

Je prends un exemple... On est en démocratie... Toutes les garanties sont données que le suffrage universel sera respecté... Sans revenir au 11 septembre qui vit les putschistes assassiner le président chilien Allende, pourtant élu au suffrage universel, sans revenir à la trahison du généralissime félon Franco Bahamonde ( de son nom complet : Francisco Paulino Hermenegildo Teódulo Franco y Bahamonde Salgado Pardo), qui massacra tant d'Espagnols... Non, je me place dans un contexte plus « serein », plus tranquille, plus « sûr », en quelque sorte. En 1981, en France... La veille de son élection, le futur président Mitterrand n'osa pas dormir chez lui... Pressentiment ? C'était un homme prudent. Victor Serge, cet écrivain militant, anarchiste lui aussi comme Mühsam, qu'il a dû croiser à Berlin dans les années vingt, dormait avec un revolver sous l'oreiller... Il finit brutalement dans un taxi à Mexico... Il avait d'ailleurs écrit, décrit ce qui l'attendait... Mais nous reparlerons de Serge.


 

 

Qui sait ce qui se passera demain ? Ou après-demain. Vois simplement ce qui se passe quand tu veux prendre l'avion... Écoute toutes ces sérénades que l'on fait à propos de terroristes... Ce n'est pas un hasard ce climat de terreur entretenu par les médias et les services de sécurité... Car de ma vie, je n'ai jamais croisé un seul terroriste. Oui, oui, mon ami Marco Valdo M.I., quoi qu'on en dise, on ne vit pas vraiment en paix... La Guerre de Cent Mille Ans n'est pas finie, les riches continuent à mener la guerre contre les pauvres (licenciements, privatisations, réduction des services au public, pressions financières...) et si nous sommes dans une sorte de trêve, n'est-ce pas le calme avant la tempête ? J'ai comme toi ce pressentiment...


 

Regarde, Lucien l'âne mon ami, il a fallu vingt-cinq ans pour que cette sensation de Mühsam se concrétise. Un matin, vingt cinq ans après, ils sont venus... Et puis, pour en revenir au présent, je voulais que ce poème soit ressenti en quelque sorte en direct, comme une pensée, comme un sentiment de celui qui le lit, de celui qui l'entend... Comme s'il se le disait à lui-même. Je ne te cacherai pas que j'ai souvent eu ce sentiment...


 

 

Moi aussi, dit Lucien l'âne, même si comme âne, je ne risque rien de ce genre... mais qui sait, si je revenais à ma première apparence ? Cela dit, reprenons notre tâche qui consiste à tisser le linceul de ce monde vieux, sénile, terriblement inquiétant, oppressant, intranquille et cacochyme. (Heureusement !)


 

 

Ainsi Parlaient Marco Valdo M.I. et Lucien Lane.

 

 

  portrait-1905.jpeg

 

 

 

Je bois mon café du matin et je ne pressens aucune inquiétude.

On sonne. Je ne pressens toujours rien d'inquiétant.

Le facteur m'apporte une lettre. Je l'ouvre sans aucune inquiétude..

Il n'y a rien d'inquiétant dedans.

« Ha ! », m'exclamé-je. Mon pressentiment ne m'a pas trompé.

 

 

 

 

 

 

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Published by Marco Valdo M.I.

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