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7 janvier 2012 6 07 /01 /janvier /2012 21:18

BALLADE DU SOLDAT-PAYSAN

 

Version française – BALLADE DU SOLDAT-PAYSAN – Marco Valdo M.I. – 2012

Chanson italienne - Cantone de su massaju-richiamadu (Sarde) et BALLATA DEL SOLDATO-CONTADINO (Italien) – Frantziscu Màsala / Francesco Masala (1981)

 

 

Tirée du recueil « Poesias in duas limbas – Poesie bilingui » (bilingue : sarde-italien), Scheiwiller, Milano (2° ed. 1993, 3° ed. ‎‎2006 per i tipi de Il Maestrale di Nuoro).‎

La section qui inclut ce chant est intitulée : « Cantones pro sos laribiancos » autrement dit "Ballate per quelli dalle labbra bianche" (Ballade pour ceux aux lèvres blanches). « Ceux aux lèvres blanches » est surtout le titre de la première oeuvre de Masala publiée en 1962 chez Feltrinelli, le récit de l'épopée des gens de Arasolè, petit hameau de la commune de Tonara, dans la province de Nuoro (Sardaigne).

Les lèvres blanches sont celles des morts de faim, des morts d'épuisement, des morts de guerre... Les Chants contenus dans cette section des Poesias in duas limbas sont donc une transcription poétique du petit roman des débuts, presque une « Anthologie de Spoon River » sarde.

Frantziscu Màsala a combattu sur le front russe à vingt-cinq ans. Avec lui 300.000 autres jeunes, en grande partie convaincus d'aller se couvrir de gloire, abusés par les boniments de la rhétorique fasciste. Il en mourut environ115.000, dont 85.000 en un peu moins de trois mois, entre décembre 1942 et le printemps suivant, pendant la seconde bataille sur le Don, la débandade et la retraite désastreuse qui en suivirent... "

« ... Il me paraît de bon compte de dire que, la guerre, je l'ai vraiment faite. J'ai été décoré à la valeur militaire, j'ai été blessé en combat sur le front russe, c'est-à-dire, comme on dit, j'ai versé mon sang pour la patrie. Mais ce qui m'est arrivé, était déjà arrivé à mon grand-père, « Gambadilegno » qui perdit la jambe droite à la Bataille de Custoza, pendant la Troisième Guerre d'indépendance. Mon intrépide jambe droite aussi s'est prise sa balle héroïque, russe cette fois-ci, là, entre le Dnieper et le Don. Je veux dire, en somme, que moi et mon grand-père, tous deux de nationalité sarde avons fait les guerres italiotes: de Sardes loyaux, il s'entend, bons héros, en temps de guerre mais mauvais bandits, en temps de paix. En guerre, dans les tranchées de la patrie, en paix, dans les prisons de la patrie... [Enfin] la guerre m'enleva, pour ainsi dire, des yeux, les bandes de deux rhétoriques officielles : d'un côté, celle de la « petite patrie sarde héroïque » et, de l'autre côté, celle de la « grande patrie italienne impériale ».‎



(Frantziscu Màsala, da “Il riso sardonico” [ Le Rire Sardonique], 1984)



Ah, dit Lucien l'âne en souriant, une chanson de Sardaigne... Je ne saurais trop conseiller à ceux à qui elle plaît d'aller voir une de tes canzones, intitulée : « La Déclaration de Guerre » ; elle relate la réaction du village sarde de Nuras au beau discours que la plus grosse légume fasciste fit le 10 juin 1940.

 

Ainsi Parlait Lucien l'âne.

 

 

 

Je suis Salvatore Mérula,

Surnommé Animamia,

Paysan d'Arasolè

Soldat-rappelé,

Mort en Russie,

Au nom de Dieu et de la Patrie.

Quand j'étais en vie,

J'avais les deux mains larges

Comme deux bêches

Et une petite femme maigre,

Aux lèvres blanches,

Qui m'avait donné sept enfants,

Grands mangeurs de pain.
Je cultivais un champ de grain

Dans les vallons du Campidano.

 

Un beau jour vint

Une « grosse légume » fasciste

Et il fit un discours, aux paysans,

Sur la bataille du grain.
De beaux mots, certes,

Qu'il nous a dit la « grosse légume » fasciste

En langue italienne,

De si beaux mots, si beaux

Qu'aucun de nous

N'y comprit rien:

En avant, camerati paysans ,

En avant à vos champs,

En avant avec la charrue et l'épée,

Au nom de Dieu et de la Patrie,

En avant et semez vos âmes dans les sillons.

 

Son discours fini, je pris ma houe,

Comme d'habitude, pour aller

À mon champ de grain.
La grosse légume me regarde et me fait:
"Où tu vas, camarade?"

Je m'en vas semer

Mon âme dans les sillons !

Voilà pourquoi les gens d'Arasolè

M'ont surnommé Monâme.

Maintenant, mon âme est ici,

Dans un sillon,

Au pied d'un bouleau blanc,

Dans le cimetière de guerre,

Ici, dans la terre russe.

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Published by Marco Valdo M.I.

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